Ordell Robbie | 3.5 | Satire bien sentie et encore contemporaine dans son propos. |
Xavier Chanoine | 3 | Brulôt poussé sur le monde de l'automobile |
Masumura trempe alors ses héros (si l'on peut les appeler ainsi) dans de sombres affaires : corruption, magouillages et mensonges, et son discours peut paraître virulent mais son approche est sincère. Quid des constructeurs de nos jours? Une lutte acharnée, des copycat en veux tu en voilà (de nos jours, la différence entre une Audi A4, A6 et A8 se ressent au niveau du gabarit) et des annonces dans les journaux. Ici, Masumura pousse le vice jusqu'à faire apparaître dans les pages d'un quotidien les deux pubs concurrentes côte à côte, histoire d'ironiser cette proximité qui les rassemblent et d'appuyer encore plus la concurrence. Tout est bon pour glaner des infos, même le sexe ou l'étalage de faux sentiments. Et si La voiture d'essai noire est un Masumura agressif, c'est parce que ce dernier ne lésine pas sur les moyens : un interrogatoire se termine en suicide (filmé intégralement, avec un joli mannequin s'écrasant sur le sol, mais l'effet est là), le premier acheteur d'une des voitures de Tiger se plaint devant le bâtiment du constructeur des suites d'un problème technique ayant entraîné un accident (une plainte sous forme de "grève", tel un salarié vêtu d'un brassard et équipé d'un mégaphone), accumulation de pots de vin, ruptures sentimentales et passages à tabac. Les espions pour le compte des deux firmes vont aussi se quereller, dont l'un des membres finira par renoncer à son travail des suites des pratiques quelque peu douteuses pour faire cracher le morceau aux principaux concernés. Là est le seul morceau de dignité du métrage. Filmé dans un scope étouffant et doté d'une belle photographie, Masumura crée l'étouffement par l'utilisation d'un split-screen et d'une faible lumière d'ensemble. Un vrai polar noir camouflé en brûlot économique -voir politique- de première, c'est ce que l'on peut appeler une belle réussite, se rattrapant en chemin des suites d'une première partie longue et trop laborieuse pour marquer. Et le final, sur la plage, est le plus bel endroit pour évacuer toute la pression accumulée jusque là. Le calme après la tempête, seule source d'optimisme.