Un mélodrame poignant porté par un trio d'excellents acteurs
The Home Song Stories est l'histoire d'une chanteuse de cabaret au destin malheureux, racontée par son fils. Le réalisateur déclare s'inspirer de son histoire personnelle, et intègre cette dimension de l'hommage dans le disposition narratif, puisqu'il se représente sous les traits du fils devenu adulte, écrivain racontant l'histoire de sa mère... Si l'on passe outre ce dispositif un peu lourd, le film est une réussite - qui doit largement aux trois acteurs, Joan Chen (récompensée du Golden Horse du meilleur premier rôle féminin), flanquée de deux gamins débutants remarquables de naturel, Joel Lok et Irene Chen.
L'histoire commence à Hong Kong en 1964, Rose chante dans un cabaret, est invitée aux tables par des messieurs très attentionnés, séduit tout le monde d'un sourire. Elle décide un jour de suivre un marin australien qui l'invite à changer de vie, et c'est là que les malheurs commencent. Rose et ses deux enfants se retrouvent dans une maison de banlieue laide et rance habitée par la mère du marin, qui part en mission peu de temps après, laissant tout le monde cohabiter tant mal que bien. L'occasion de quelques scènes comiques, Rose se moquant ouvertement de la "vieille vache", invitant bientôt un amant qu'elle présente comme son neveu, il faut dire qu'il est jeune. Expulsés peu après, la petite famille erre, le fils fait la tête et la mère est de plus en plus malheureuse. Le je
une amant fait naître une rivalité entre la mère et la fille, adolescente timide mais dont les charmes vont croissant. Des tentatives de suicide multiples donnent le ton - pathétique - d'une histoire de plus en plus triste. L'épilogue dit clairement, à travers l'objet des robes conservées mais remisées, qu'une vie fondée sur la séduction est vouée au malheur - cette morale de l'histoire peut paraître simpliste, mais le film dresse un portrait très individualisé et nuancé d'un trio attanchant.
Entre deux journées plus ou moins malheureuses, le fils, Tom, rêve - se rêve, en prince charmant, en héros de wu xia pian ; ces plans sont autant de petits films dans le film qu'ils ponctuent de manière très délicate - ramenant toujours l'histoire au point de vue de l'enfant. C'est ce point de vue qui fait la force du film, l'enfant jetant un regard sans aucune compassion sur sa mère à la dérive. Le regard noir de l'enfant fait comme un filtre entre le spectateur et la protagoniste, et c'est ce qui paradoxalement rend le film authentiquement pathétique.
