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Les Soeurs de Gion
les avis de Cinemasie
4 critiques: 3.5/5
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13 critiques: 3.71/5
Seules contre tous
Dans cette période d’avant-guerre très particulière d’un Japon qui se militarise et envahit peu à peu l’Asie après une crise économique sans précédent, Mizoguchi pose sa caméra dans le quartier des divertissements de Gion, à Kyoto, pour y décrire la vie de 2 sœurs geishas que tout oppose : l’aînée, Umekichi, croit dans les traditions et les conventions relatives à son métier, restant en retrait, polie avec des gens encombrants et ne cherchant pas à s’enrichir sans l’avoir mérité ; la cadette, Omocha (qui signifie « jouet » en japonais), est beaucoup plus directe et sans concessions : puisque la société n’est basée que sur l’argent, elle va aller le débusquer où il se trouve, c’est-à-dire chez les hommes aisés, quitte à les arnaquer en leur faisant miroiter un statut de protecteur ou un mariage.
Mizoguchi dépeint ici une situation complexe. Les hommes ne semblent en effet plus vraiment attirés par le quartier des geishas (peut-être ont-ils d’autres choses en tête, comme la guerre ?). Conséquence, la vie devient très dure pour les 2 sœurs qui accumulent les dettes. Enfermées dans leurs statuts qui ne leur laissent que peu de choix pour s’en sortir, l’une est tentée par l’acceptation de la misère en attendant des jours meilleurs, tandis que l’autre ne s’avoue pas vaincue face à cet état de fait. Elle le payera très cher.
Une nouvelle fois, les hommes n’ont pas le beau rôle. L’un se sert de la dot de sa femme pour monter un commerce, puis fait faillite et doit vendre tous ses biens. Le patron est montré comme quelqu’un de veule qui voit une geisha à l’insu de sa femme et n’ose pas affronter le regard de ses employés – il n’hésitera d’ailleurs pas à en licencier un suite à une magouille. Mais les femmes ne sont pas montrées sous un grand jour non plus : Omocha séduit, ment, use de ses charmes pour de l’argent… En fait, une tension palpable entre les personnages se met en place avec pour toile de fond la lutte pour
la survie. Une atmosphère revendicatrice voire pré-révolutionnaire (sans doute influencée par les idées venues d’Union soviétique) s’étend sur l'oeuvre dont la mise en scène est magnifique : personnages filmés de loin dans la pièce voisine, panoramiques et travellings très travaillés, puis plans rapprochés pour faire monter la tension (ex : la scène de l’enlèvement dans le taxi), maîtrise de l’ellipse,… Un beau film chargé de symboles, disponible dans une excellente édition DVD.
Un premier chef d'oeuvre
Deux soeurs occupent une maison de geishas à Gion, le quartier des plaisirs de Kyoto. L'aînée croit aux traditions de son métier ; la cadette a conscience de son avilissement et choisit de tirer parti de la faiblesse des hommes pour se constituer son pécule. La première refusera un homme riche pour rester fidèle à son ancien protecteur, tombé dans la misère : la seconde rejettera un amoureux sincère et pauvre pour lui préférer son patron ; à la fin, toutes deux finiront seules et sans argent, les hommes qu'elles pensaient servir ou dont elles pensaient se jouer les ayant abandonnées ou rejetées.
Fulgurante réussite que ce court film (70 mns) de 1935. Toutes les oeuvres ultérieures de Mizooguchi sont déjà là et jamais, je pense, le maître n'a fait preuve d'une aussi admirable concision. Le scénario est admirable et remarquablement construit, sans que l'architecture d'ensemble n'apparaisse trop lourde ou démonstrative ; ltout l'art mizoguchien de la mise en scène est déjà là (rareté des pkans rapprochés, admirables plans séquences, épure qui interdit tous les mots ou mouvements inutiles).
La scène finale (avec le cri du coeur de la cadette : "Pourquoi faut-il que ce métier existe ! ") est bouleversante. A voir absolument.
Plus intéressant que divertissant
En effet, ce film court (environ 1 heure) ne vous impressionnera par son côté spectaculaire, mais il pourrait vous époustoufler par la maîtrise technique de Mizoguchi. Excellente et sobre mise en scène, bons acteurs, sujet intéressant... Bonne introduction au cinéma de Mizoguchi, la poésie et la grâce arriveront sur les prochains films du maître.
tournicoton tournicota
Faut avouer que l'intrigue (à base de coups fourrés de toute sorte et autre maniplations, niark niark) se laisse bien suivre. Après, il est très probable que la mise en scène, très statique, ait pris un bon coup de vieux.
Soeurs pas du tout jumelles
Remis en selle par la satisfaction toute personnelle de toucher d'avantage à ce qu'il cherche à exprimer après son "Osaka Elegy", Mizoguchi continue sur sa lancée en réalisant ce "Sœurs de Gion". Prenant pour point de départ le genre du gendai geki (histoires d'amour impossibles entre prostituées et leur protecteur), le cinéaste demande à son fidèle collaborateur et scénariste YODA de lui imaginer une histoire aux antipodes du genre incluant un personnage féminin, qui se révolterait contre sa condition. En résulte le sensible portrait de ces deux sœurs diamétralement opposées, dont l'une poursuit la parfaite soumission à la gente masculine et l'autre tentera de manipuler les hommes à ses propres profits. Toutes deux seront punies par le sort et à Mizoguchi de dresser le terrible constat qu'à n'importe quelle attitude choisie, les femmes sont conditionnées par leur sort dans un monde opprimé par la cruauté des hommes.
Réactionnaire, acerbe et en avance sur son temps, cette fois le cinéaste ne s'attirera pas les foudres du Comité de la Censure, mais par le président du syndicat d'Otsubu, qui avait laissé à l'équipe entière liberté de tourner dans le quartier de Gion pour en faire la "promotion", et par les prostituées réfutant leur représentation. Le film a été un échec en raison d'une distribution insuffisante de la compagnie de production de la Daichi Eiga, qui déposa le bilan peu de temps après.