Bonne ligne
Sexy Line, c’est du polar ni grand ni médiocre, représentant le meilleur d’un Ishii Teruo qui alterna artisanat correct et très mauvais. Soit des acteurs bons mais pas grandioses, un scénario ni excellent ni raté associés à une mise en scène bonne sans être transcendante et un score jazzy plaisamment cool à l’oreille. Certains choix d’angles de vue sentent le tape à l’œil, le style caméra à l’épaule ne produit parfois que du simple effet d’agitation mais dans l’ensemble la mise en scène s’installe dans une légèreté plaisante, une insouciance au diapason des sixties naissantes. Et si cette voie fut ensuite explorée plus brillamment par Fukasaku, cette approche sous influence "documentaire" tranchait en son temps dans le paysage du film de genre nippon. Du coup, on pardonnera au scénario ses « hasards et coïncidences » faciles et son absence totale d’originalité dans le traitement. Car après tout la décontraction se dégageant de l’ensemble fait de Sexy Line un de ces films se regardant avec le plaisir routinier éprouvé face à ces films de genre déroulant en service minimum le bon savoir faire d’un système de studios dans ses années florissantes. Des prostituées, des gangsters, un flic injustement accusé, du rebondissement et la mécanique est bien en route…
Sexy, décontracté et glamour
S'il est dit partout que le cinéma japonais des années 60-70 est fabuleux, on pense surtout aux chambaras et aux drames historiques, les grandes oeuvres qui ont traversé les frontières et les années pour nous arriver par sorties vidéo ou salles discrètes, voire festivalières. C'est vite oublier (enfin surtout ne pas connaître) l'existence de polars et films d'exploitation dont les seuls costumes ressemblent tant aux nôtres de la même époque. Sexy line est de ceux-ci.
Ce film du prolifique Teruo Ishii (direction et scénario) est une agréable surprise pour celui qui ne connaissait que Seijun Suzuki. Si ce polar n'atteint pas les sommets du maître, il n'en est pas moins intéressant (en fait si pour dire la vérité, mais juste un poil moins). Impeccablement fait, il pourrait se voir comme un Hitchcock hollywoodien, avec ce héros naïf qui n'a rien demandé à personne et qui se retrouve du jour au lendemain embringué dans une histoire trouble. Sans être pourtant aussi sujet à l'analyse qu'une oeuvre du maître (encore un), il possède le même glamour, avec ces interprètes merveilleusement dirigés et qui sont réellement attachants.
Porté par une bande son sixties entraînante, le récit laisse la part belle aux personnages féminins. Le Cary Grant de service (Teruo Yoshida, excellent) est tout à fait crédible : parfaitement couillon, pas très débrouillard, c'est le petit employé pris dans le tourbillon et non pas le super-détective latent. Le commissaire de police lui, n'est pas très zélé et préfère aider les petits enfants plutôt que poursuivre activement les criminels. Les brigands sont coriaces mais pas très malins. A côté de ça les femmes sont adorables, mignonnes, craquantes, dynamiques, fines, intelligentes.
Bourrées de mimiques, les scènes sont très agréables à regarder. Malgré le thème assez glauque, l'ensemble baigne délicieusement dans une ambiance très décontractée (un peu trop parfois avec l'acteur qui sourit quand il est poursuivi par une horde de tueurs). Pas du tout prétentieux, Sexy line prouve qu'il existe (existait) des films d'exploitation pas du tout raccoleurs (par rapport à ceux des seventies), accrocheurs, qui peuvent être multi-visionnés plus grâce à un jeu de comédiens ultra-performant (ah ces actrices, miam !) qu'aux scènes-choc.
07 juillet 2002
par
Chris