Entre chamaillerie et réconciliation.
On retrouve un Ozu pleinement ancré dans la période des années 30 et son lot d'influences occidentales, en passant par une déclaration étroite à son cinéaste fétiche pour cette comédie enlevée, exempt de messages dramatiques. Pire même, les thèmes souvent abordés par le cinéaste (par le passé et surtout pour son futur cinématographique) comme ceux de la famille sont ici aux abonnés absents, préférant chroniquer vaguement les relations plus qu'amicales entre une nièce et son oncle, face au regard épuisé de la femme de ce dernier. L'occasion pour Ozu de nous livrer une comédie aux accents burlesques et au comique de situation bien présent, subsistent en effet ça et là une poignée de séquences drôles au possible : l'introduction avec les trois femmes évoquant les rides sur leur visage (elles s'entraînent à rire d'une certaine façon d'ailleurs), la mise en garde de l'oncle à sa nièce, simulée et fausse lorsque la tante se pointe, ou encore certains dialogues particulièrement bien trouvés.
Mais le plus étonnant est qu'Ozu signe ici une oeuvre se déroulant dans un milieu particulièrement aisé et influencé de toute part par la mode occidentale (les appartement sont immenses, les portes d'entrée font 3m, ils mangent et travaillent sur des tables surélevée, loin des us et coutumes nippons traditionnels) ce qui donne cette impression, justifiée à maints égards, d'être en face un Ozu qui s'oublie rapidement, sans pour autant être dénué de qualités évidentes ayant longuement fait sa réputation de la fin des années 20 jusqu'à celle des années 30. Une curiosité.
Il était un père
Ozu Yasujiro avait reconnu avoir appris l'art de filmer au contact des films d'un Lubitsch très populaire au Japon durant ses jeunes années. L'influence de ce dernier est très visible dans Qu'est-ce que la dame a oublié?, comédie qui est son second film parlant. Contrairement à Femmes et voyous, Ozu ne fait néanmoins pas cette fois dans l'mitation servile du cinéma occidental. Meme si ces parti pris sont ici moins systématiques que par la suite, on retrouve dans les scènes d'intérieur son sens de l'ellipse et ses fameux plans à hauteur de tatami associés à une certaine lenteur contemplative. Mais on sent dans le dialogue comme dans la direction d'acteurs une volonté de tendre vers cette ironie suggestive qui a façonné le terme de Lubitsch's touch. La satire de la bourgeoisie tokyoite et de son obsession de la propreté des apparences, d'un désir de se conformer à la tradition qui n'est qu'apparence. On y voit un mari noyant son ennui dans le monde des geishas tout en mentant à sa femme et la complicité des femmes au foyer discutant de tout et rien. Et c'est un corps étranger qui joue le role de révélateur: une Setsuko voulant montrer à sa famille ce que signifie le mot moderne, partagée entre un jeune homme et la participation aux "amusements" de son oncle dans une maison de geishas, amusements qu'elle a démasqués. Assez drole, le film semble esquisser les parties comiques des Ozu de fin de carrière. Mais un scénario insistant trop sur le foyer familial et les rapports Setsuko/son oncle au détriment des rapports entre Setsuko et le jeune homme empechent le film d'etre un Ozu majeur.