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Pluto

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les avis de Cinemasie

3 critiques: 4/5

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3 critiques: 3.92/5



Arno Ching-wan 4 Pluto, c’est l’ami de Mick… d’Astro, pardon.
Astec 4 Pluto, 2 fois qu'une...
Ordell Robbie 4 Relecture/réappropriation/réactualisation réussie.
classer par notes | date | rédacteur    longueurs: toutes longueurs moyen et long seulement long seulement


Pluto, c’est l’ami de Mick… d’Astro, pardon.

C’est fini ! Tome 8, hop, terminé. Comparé au bon millier – bon, ok, 24 - de volumes du marathon narratif – et financier ! -  20th Century Boy, que je n’ai toujours pas terminé, cet Urasawa-là fait office de chétive nouvelle de SF. Ce qu’elle n’est pas : l’œuvre est ample, riche de personnages nombreux et construits, d’imbrications dramaturgiques et dramatiques géniales, d’action, d’émotion…

Dans le suspens feuilletonesque Urasawa impressionne toujours autant avec cette capacité toute particulière qu’il a à maintenir une tension, à créer des accroches, à gérer des crescendos sensitifs ici beaucoup plus pertinents et aboutis que ceux d’un garçon du 20ième siècle bien trop roublard. A force de jongler avec quinze personnages tout en pratiquant à la fois un exercice de haute voltige sur plusieurs histoires, et de funambulisme avec des rebondissements qui se doivent, sur une corde de quelques petits millimètres de diamètre seulement, de conserver une parfaite cohérence globale, Urasawa, comme cette phrase, épuise. Et s’il retombe toujours joliment sur ses crayons, on peut avouons-le décrocher avant que l’artiste ne le fasse lui-même avec sa toute dernière pirouette. C’est un filou. Il était déjà borderline sur un Monster trop long qui, parce qu’il emportait le morceau in fine, entrainait l’adhésion… auprès des plus patients !

Avec Pluto, Urasawa est cadré par le manga de Tezuka et ces 8 tomes contractuels. Etrangement, cela semble le gêner sur un final qui aurait à mon sens gagné à s’étaler sur un tome de plus afin de mieux lisser le mélo, raté sur la dernière page du climax. Même si le manga se rattrape avec une belle idée, trop expédiée à mon goût, lors d’un épilogue jouissif qui donne la part belle à l’un des personnages les plus gonflés du manga.

Les premiers tomes sont beaucoup plus impressionnants que ne le sont les derniers, la faute à la désaffection d’un personnage Urasawesque au profit, obligé, de celui de l’intouchable Tezuka. C’est indiscutable quant à la logique du scénario mais malheureusement assez dommageable dans ses aspects empathiques.

Je chipote : j'éprouve déjà l'envie de relire tout le manga d'une traite. Pluto reste le mélange réussi de deux univers qui me parlent, celui de Tezuka et celui d’Urasawa, qui je l’espère va ENFIN s’affranchir de toutes ces lourdes influences – ici la père de Black Jack, ailleurs Stephen King – pour exister pleinement. Pour cela, il va lui falloir supplanter la grave crise identitaire que subit actuellement le japon, ce qui est loin d’être une tâche aisée.     

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"Brau-1589", robot du futur mal en point en mode Hannibal Lecter. Un pote au "Projet 2501" ?

03 juillet 2011
par Arno Ching-wan




Pluto, 2 fois qu'une...

Naoki URASAWA n'en a jamais fait mystère, depuis son enfance il voue une véritable passion à l'oeuvre de Osamu TEZUKA. Alors quand en 2003 il lui est proposé de se frotter à l'univers du maître, il choisit naturellement de porter son dévolu sur une des histoires les plus marquantes de Tetsuwan Atom (Astro chez nous), le manga phare de TEZUKA. C'est ainsi que l'arc narratif original de plus de 180 pages publié en 1964 et intitulé Le robot le plus fort du monde, devient avec Pluto une série à part entière en 8 volumes. Le succès est immédiat, public comme critique (Prix Tezuka et prix au Japan Media Arts Festival en 2005), et amplement mérité, URASAWA se saisissant à bras le corps de l'intrigue originale pour en livrer une relecture moderne et mature. Pluto c'est en quelque sorte Astro pour les grands, un manga qui respecte l'héritage et l'esprit de TEZUKA tout en l'actualisant, en le ré-insérant dans le courant de l'histoire contemporaine. Mais URASAWA ne se contente pas de rendre hommage au maitre, il va au-delà en injectant ses propres thématiques à celles véhiculées par l'histoire originale, épaississant d'autant plus l'univers.

Il y a du Alan MOORE dans la façon dont le mangaka a abordé Pluto, dans sa manière d'instaurer une certaine distanciation - un décalage - dans notre rapport à des univers familiers et emblématiques de la pop' culture, des univers s'inscrivant dans un des genres constitutifs du manga et des comics. Une approche « à la Watchmen » donc, les robots occupant la place que les super-héros tiennent dans le comics de MOORE. Les parallèles sont nombreux et évidents : chez MOORE et URASAWA il est question de super-êtres instrumentalisés pour la guerre (le Viet-Nam et le conflit d'Asie Centrale), dans les 2 histoires le fil conducteur est un complot visant à éliminer ces super-êtres, les 2 intrigues sont conduites comme des thriller où mystères et manipulations s'enchaînent, les 2 scénarios « humanisent » ces super-êtres en les mettant en scène avec leurs contradictions propres. Et il y a même plus, les personnages principaux qui mènent l'enquête dans le manga et dans le comics comptent eux aussi parmi les super-êtres visés, Rorsach étant un super-héros schizophrène chez MOORE et Gesicht un super-robots à la personnalité tronquée chez URASAWA. Même le choix de leurs noms se font écho : Rorsach évoquant la psychanalyse et son fameux « test de Rorsach », tandis que Gesicht, qui veut dire «visage » en allemand, pose la question de la personnalité et, par extension, celle des troubles de la personnalité.

       

Autre point commun et qui rapproche encore plus Pluto du Watchmen de MOORE, c'est l'importance du contexte et l'irruption du politique, dimension également présente chez TEZUKA mais sand doute pas de façon aussi directe. Ainsi dans Pluto, malgré les noms fictifs des pays hormis le Japon, le contexte fait directement référence à notre époque : Le Roi Darius IV et le « conflit d'Asie Centrale » évoquent Saddam Hussein et l'Irak, cette partie de l'histoire déclinant même le schéma de la guerre et de l'occupation initiée par les US en Irak. Au prétexte infondé invoquant la présence d'armes de destruction massive dans la réalité, le manga substitue le prétexte infondé de la construction de « robots de destruction massive ».

L'autre référence, inévitable et déjà attachée au manga de TEZUKA, celle à l'écrivain de SF Isaac ASIMOV, « père » des fameuses lois de la robotique. Dans le manga de TEZUKA, comme dans la version d'URASAWA, ces lois sont évoquées à de multiples reprises et mettent surtout en relief - comme dans les romans d'ASIMOV- l'absence d'un tel cadre contraignant pour des humains s'autorisant tout ce que les lois interdisent aux robots, dont le droit de tuer d'autres humains. Chez TEZUKA comme chez ASIMOV, et aussi chez URASAWA, les robots ne sont pas seulement un sujet pour eux-même, mais une parabole du rapport à l'étranger, véhiculant un discours sur la ségrégation, le racisme, les préjugés, posant la question de ce qui définit l'humanité au sens philosophique du terme. Les robots évoluent, s'humanisent, alors que la société autour d'eux semble chaque jour se faire plus inhumaine... Dans Pluto la filiation avec ASIMOV franchit un cran, et avec le personnage de Gesicht on pense immédiatement au fameux robot R. Daneel du Cycle des robots, personnage cardinal de l'univers « asimovien » : les 2 sont des détectives robotiques enquêtant sur des meurtres perpétrés par un robot en contradiction avec les lois de la robotique. A toutes ces références – Tezuka, Moore, Asimov – viennent s'ajouter les propres obsessions thématiques d'URASAWA, dont celle du fascisme et des dérives sectaires déjà présente dans Monster et  20th Century Boys.

Avec Pluto Naoki URASAWA réussit la quadrature parfaite du cercle : il "remake", rend hommage et va au-delà du manga de TEZUKA tout en le respectant profondément. Le dessin réaliste, en opposition à celui plus « cartoon » de TEZUKA, participe au décalage du point de vue. Les clins d'oeil à l'oeuvre du maitren, la présence des personnages habituels des castings de TEZUKA, un Astro qui n'est pas ici le héros mais reste un personnage important et récurrent, maintiennent une forme de continuité sublimée par des portraits indédits et bien plus contrastés de ces derniers. Et l'intrigue est menée de main de maître, haletante, riche de questionnements, de révélations et de moments de forte tension dramatique, et sans les longueurs inévitables des séries de plus de 15 volumes (faire moins de 10 volumes, une obligation contractuelle ici, bien vue) qu'URASAWA nous livre habituellement. Pluto est un grand manga, digne de la réputation de TEZUKA, à la hauteur du talent d'URASAWA.



21 août 2010
par Astec


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