Faux semblants
Si le thème abordé ici est proche de
Suicide club, la forme choisie n'a plus rien à voir : durée impressionnante de 2h40 qui n'évite bien sûr pas de nombreuses longueurs, découpage par chapitres centrés tour à tour sur chacun des 4 personnages principaux, disparition des effets gore et excentriques, ou encore voix off permanente qui relate de bout en bout les pensées des différents protagonistes.
La conclusion de
Requiem pour Noriko fait cependant autant froid dans le dos. Pour Sono Shion, les générations n'arrivent plus à communiquer entre elles. Un père absorbé par son travail, une mère effacée, 2 filles mal dans leur peau qui chattent sur le web, puis fuguent loin de cet univers ennuyeux à mourir. La famille japonaise traditionnelle se décompose alors, se désagrège lentement, comme l'a constaté avec lui Miike, Kurosawa K., et même déjà Ozu en son temps si l'on en croit Sono. Pertes de valeur. On se replie sur soi, sur son petit monde. Il faut désormais oublier qui l'on est et se réinventer une autre identité, une autre personnalité. Kumiko, par exemple, propose à des clients solitaires et malheureux de jouer la comédie en interprétant leur femme ou leur fille absente. Kumiko, cette fille née dans une consigne automatique qui collectionne des souvenirs fictifs pour paraître quelqu'un, alors qu'elle n'est personne. Mais il ne faut pas souffrir. Il faut rester connecté avec soi-même en jouant un rôle, celui que la société attend de vous. L'art de l'illusion, entériné par un gourou qui révèle avec assurance le grand Cercle de la Vie, à l'intérieur duquel se trouve la Mort, dont le Suicide n'est qu'une des branches naturelles.
Le bébé de la consigne automatique
Fausse séquelle à son précédent "Suicide Club", le réalisateur Shion SONO aborde une nouvelle fois les travers de l'actuelle société nipponne en se référant explicitement à son métragé antérieur (et d'expliquer d'une autre manière la vague des suicidés). "Noriko's Dinner" comporte les mêmes qualités et défauts que son prédécesseur.
Tout d'abord, le sujet est pour le moins intriguant : une agence qui met à disposition des candidats pour prétendre jouer les proches pour des commanditaires pour les plus diverses raisons. Le constat des cellules familiales totalement éclatées est de nouveau très appuyé dans l'ouvre du réalisateur et la seconde partie fait un large écho à la première, présentant la déprimante vie familiale de Noriko.
Si la première partie est déjà trop longue, "l'enrôlement" de Noriko par la mystérieuse Ueno54 au bout d'une heure de métrage relance singulièrement l'intérêt; seule l'utilisation systématique (jusqu'au bout du film) et les nombreux allers et retours temporels finissent par lasser complètement. Totalement voulus, pour créer une plus forte distanciation des personnaes à leur environnement et multiplier points de vues et pistes (inabouties), elle est souvent prétentieuse et maladroite, en tout cas agaçante sur la (trop) longue durée.
Le sujet de la seconde grande partie est donc passionnante et renvoie directement aux meilleurs romans de MURAKAMI Ryu (à commencer par al consigne automatique); le film s'écroulera définitivement dans la dernière partie, pourtant commencée de manière magistrale : dans sa recherche, le père de famille imagine un tortueux scénario pour tenter de retrouver ses filles. Paroxysme absolu du mal-être familial (japonais), l'action se traine malheureusement en longueur, verse dans un dénouement grand-guignolesque un brin provocateur, mais avant tout totalement gratuit, pour s'achever sur une conclusion quelque peu bâclée et facile dans le sens où elle laisse trop de questions en suspens. Le sort de bien des personnages ne sera jamais explicité, alors qu'un protagoniste secondaire devient tout d'un coup le personnage clé se justifiant d'avoir pu "grandir" grâce à l'aventure - semblerait davantage, que SONO - également scénariste - n'ait pu tout à fait trouver de dénouement satisfaisant et s'est contenté d'une pirouette, laissant à un chacun libre d'interprêter qui ne connaît pas de réelle explication.
En revanche, la référence à son précédent "Suicide Club" est excellement rendue et établit un véritable univers d'un film à l'autre - sûr, que des personnages et situations des deux films re-apparaîtront dans d'autres.
Quelques merveilleuses scènes (cultes) pour une trop longue durée et un scénario largement inachevé.
N'est pas Murakami Ryu qui veut....
Suicide Club fut vraiment une révélation et une expérience cinématographique qui aujourd'hui encore force le respect. C'est vous dire si sa "séquelle" était attendue avec impatience. Quelle déception et surtout, c'est là le pire, quelle ennuie! Si la mise en scène est de loin supérieure à Suicide Club, avec sa brillante idée de scinder le film en plusieurs chapitres, ses 2h40 sont à la limite du supportable. Certaines parties du film s'allongent, se déforment, s'imbriquent et ce méli-mélo finit par lasser. Même si le réalisateur nous interpelle sur la nécessité du dialogue au sein d'une famille, que chaque personne est différente et non formatée comme le voudrais la société japonaise, finalement n'intéresse plus dés la moitié du film, et nous assomme sournoisement avec son final outrancier à la limite du ridicule. Ce film avait tout pour réussir, de très bons acteurs (Tsugumi est envoutante dans le rôle de Kumiko) et une mise en scène soignée aidée par une voix-off captivante. Non finalement Noriko's Dinner Table aurait pu être un chef d'œuvre s'il avait été plutôt un roman
Je m'appelle Mitsuko
Vision très acerbe d'une société Japonaise déshumanisée et en mal d'être selon
Sono Shion. Ce dernier s'en tire nettement mieux par rapport au précédent
Suicide Club grâce à un scénario beaucoup plus interessant et surtout fluide.
Au final, il en résulte un film assez flippant qui en plus de ça met vraiment mal à l'aise. Dans l'ensemble c'est plutôt bien réalisé (malgré l'omniprésence de la voix off) et les commédiennes sont assez bleuffantes (petite dédicace pour l'actrice
Tsugumi migonne à croquer).
Un film à voir que l'on pourrait aussi qualifier comme une bombe à retardement.