Twice a Killer
Eh beh je l'ai bcp aimée, moi, cette nouvelle mouture de The Killer. On connait les brouillons qui ont amené à des chefs d'oeuvre - Heat et Patlabor 2 sont mes exemples habituels - moins les chefs d'œuvre révisités par leurs propres auteurs*. Assumons ici une approche récréative avec ce très joli contre-pas de danse féminin : l'ambiance est légère, le heroic bloodshed devient limite caper, le mélo se transforme en feel good movie et la noirceur du double aveuglement retrouve finalement la lumière. Photo nimbée, tueuse colibri, ballade rythmée... RAS, c'est très bon. Et qu'on a une action satisfaisante, et que le score de Beltrami est franchement excellent, et que Arno il est content. Léger ventre mou au milieu, ok, mais c'est bien tout. La tonalité "film de vieux apaisé" est palpable, ça me convient à moi qui ne rajeunis pas non plus. Plus que sur un Silent Night qui lui aussi jouait le contre-pied d'un John Wick avec une balle dedans le pied à l'arrivée tout de même. Pas là, c'est assez miraculeux. Le casting ne m'a jamais dérangé, au contraire, tout le monde est à sa place et Omar Sy plutôt crédible.
Les connexions avec le The Killer de Fincher sont amusantes : exercice de style, map parisienne, moto électrique... à l'avantage de John Woo pour ma pomme. Le plaisir que j'ai éprouvé à retrouver l'élégance discrète mais brillante de sa mise en scène, ce à quoi je ne croyais plus, n'a pas de prix.
Une scène au commissariat au milieu du film est assez mauvaise, surtout à l'écrit, allez. Sy est une star désormais, il soigne ses personnages façon Tom Cruise. Il veut rester solaire. Ainsi on retrouve parfois l'élégance racée des meilleures scènes de MI2 par exemple, qui avait cette meme tonalité. J'ai trouvé que ça rentrait dans les cases son côté jovial - et massif. On peut trouver ses sourires de connivence trop appuyés, mais revoyez ceux de Danny Lee sur les séquences "Mickey et Dumbo" de l'original, ça va. Je n'ai pas ressenti de gêne avec les jeux de Cantona et Taghmaoui ; juste que l'un des deux aurait dû laisser tomber sa paire de lunettes et avoir davantage confiance en son interprétation. La héroïne est charmante avec ce jeu faussement effacé. Physiquement, hormis la scène des toilettes très bessonienne du début, elle se tient bien. Quant à Sam Worthington, il campe un vilain mémorable.
J'ai aussi bien apprécié l'utilisation du split screen là-dedans, peut-être inspiré de Thomas Crown, je ne sais pas.
Les scènes d'action ne sont évidemment pas aussi démentes qu'autrefois, mais restent galvanisantes. On est largement au-dessus de Black Jack, faut arrêter.
Je reverrai cette occurrence avec plaisir. C'est un peu comme si Woo s'excusait auprès de ses personnages d'antan de leur en avoir autant foutu sur la gueule ^^
L'OST est un bonheur. Si j'avais l'occasion d'interviewer qq'un ici, je commencerais par Beltrami (Yuma !)
Qq notes d'entrée piquées au chi mai de morricone - clin d'oeil au Professionnel avec bébel - chi mai aussi perso du film joué par la propre fille de Woo. Son duel de snipers, au sein duquel le scénariste Brian Helgeland glisse le doublé de la scène de trahison de fort belle manière, est particulièrement appréciable
* Patlabor 2 est un double exemple. Oshii l'a traité 3 fois : en amont avec les oav et en aval avec un live de sinistre mémoire.