Xavier Chanoine | 2.5 | Joli numéro de Song, mais un film manquant d'envergure |
Elise | 3.25 | Un bon film de mafieux coréen réaliste |
Deuxième film de Han Jae-Rim, The show must go on est une déclaration au film de gangster acceptable malgré son manque de profondeur et la faible épaisseur de ses personnages. Kang In-Gu (Song Kang-Ho) n'est pas le vendeur de fruits qu'il prétend être depuis 4 ans, mais plutôt un des hommes du clan des "Chiens" qui livre une guerre sans mercie aux "Jaguars". Sa vie sentimentale et familiale en prend un coup lorsque sa femme s'apperçoit de sa véritable identité, tout comme sa fille incapable d'entendre raison. Il décide donc de faire tout son possible pour recoller les morceaux usés d'une vie ratée, de racheter une maison plus luxueuse avec l'eau courante, de laisser de côté la boisson et les vieux copains du milieu, en vain. Ses méthodes de gangster plutôt expéditives montrent que la corruption et le milieu du gangstérisme sont encore bien présents à Séoul puisque les bandes semblent se mêler à la foule sans trop de gêne, font signer des contrats abusifs, achètent les professeurs à coup d'entrées gratuites dans des boîtes de strip-tease et que sais-je. A l'instar d'un Kitano, les gangsters trouvent aussi du bon temps en s'arrosant à coup de bouteilles d'eau en plein repas, rigolent et chantent au karaoké, rien qui ne laisse supposer quelconque différence avec l'oeuvre du cinéaste nippon. Mais à n'en pas douter, Han Jae-Rim n'a pas le dixième de son talent lorsqu'il est question de mêler adroitement polar sec et humour déconne puisqu'on sent à travers son oeuvre la difficulté de poser clairement son style et ainsi le rendre plus profond. Et ce manque de profondeur se ressent aussi à travers le portrait des personnages, la femme de In-Gu ne semble que constater les dégâts, de loin, sans tenter de trouver des solutions (à part le divorce), sa fille apparaît de temps en temps pour bouder et reprocher à son père d'exister, et ses potes mafieux servent plus de décoration qu'autre chose.
Pourtant, The show must go on contient ses petits moments (mais vraiment petits) de cinéma amusant lorsque Song Kang-Ho semble prendre goût à la torgnole aussi bien en tant que donneur que receveur. Quelques empoignades d'homme telles qu'on le connaît ressurgissent donc de plus belle, passages à tabac en voiture, bagarre générale sur un chantier ou dans une supérette forment donc le divertissement trop longtemps laissé de côté par le cinéaste car son oeuvre hésite beaucoup trop dans sa démarche de rendre son personnage principal pathétique ou apitoyable, In-Gu ne faisant réellement rien pour que l'on ai pitié de son sort ([spoiler] Il ira jusqu'à descendre son patron après avoir causé accidentellement la mort de son frère [fin spoiler]) et on comprend alors le désarroi de sa famille. Les pauvres. Cette irrégularité de ton laisse heureusement échapper ça et là un humour bien venu comme lorsque In-Gu repart tranquillement au bord de sa Mercedes après s'être crashé ou lorsqu'il décide de se tuer car se sentant père indigne. Un second degré pleinement ancré dans le registre du pathétique cher au personnage campé par Song Kang-Ho qui ne trouve pourtant jamais de justification. Et le polar de base mêlé à la comédie populaire coréenne se transforme en véritable carnage assez grossier en fin de métrage, puis en comédie dramatique typique lorsque la fille de In-Gu retrouve quelques photos souvenirs lui rappelant de bons moments, pendant que son père se fait soigner dans la chambre d'en face. Cliché mais inévitable, le film tombe même dans la mièvrerie la plus totale dans son dernier plan, avec son héros abattu et seul, incapable de sortir d'un tel pétrin, le milieu de la mafia. Sans être un ratage total, The show must go on n'apporte rien de plus au film de gangster, ni même à la comédie coréenne qui nous a clairement habitué à mieux.
The Show Must Go On n'a rien d'un chef d'oeuvre, mais a pour lui qu'il ne cherche pas à faire plus que son genre exige. En bref, il n'exagère jamais en montrant les problèmes moraux qu'endure In-Gu, le personnage principal, joué par un Song Kang-Ho en pleine forme. Il doit faire son métier difficile tout en assumant le regard de sa femme, qui tolère la situation jusqu'à un certain point, et de sa fille qui se doute qu'il est gangster mais essaye de se convaincre du contraire. Ici, on nous montre bien la maladie coréenne du succès social où le personnage, qui n'a pas assez d'argent, veut quand même acheter une maison dans l'un des quartiers les plus chers de Seoul. Coté mafia, rien de bien différent des autres films du genre ; on pourra juste noter un grand appétit pour l'humour, toujours au travers du personnage de In-Gu, qui fait vraiment tout dans le film.