Un Ozu inédit et pourtant majeur.
Femme d'une nuit est l'un des Ozu les plus importants hélas passé sous silence. Son style, emprunt d'une aura définitivement occidentale, étonne par sa facilité à recréer les ambiances des polars US d'époque avec ses silhouettes inquiétantes, ses visages blêmes, ses éternels feutres sur la tête et les pétards à six coups au cas où le danger se ferait ressentir. Armé d'un scénario simple mais efficace, Femme d'une nuit cache au fond de ses vieux tiroirs un certain humanisme, au demeurant très fort, puisqu'il est question de vol d'argent pour payer les soins destinés à un enfant. Hélas, l'homme coupable de cet acte est traqué par un flic persistant aux méthodes peu orthodoxes. Ce dernier s'invite en effet carrément chez son criminel, attend patiemment sur le divan, clope au bec, jusqu'à même piquer un somme.
Occidental donc dans son traitement, Femme d'une nuit n'a de japonais que dans l'accoutrement de Yagumo Emiko et son kimono traditionnel. De là à trouver cet Ozu impersonnel, pas forcément puisque subsistent ça et là tout le charme et la naïveté rassurante du cinéaste, notamment dans l'un des derniers plans du film où Yagumo Emiko salue avec sa fille dans ses bras, son mari accompagné du policier, comme un dernier adieu. Une séquence absolument adorable, contrastant drôlement avec l'atmosphère froide et suintante de la première heure, presque inhumaine. Au niveau de la mise en scène, Ozu déploie un éventail assez large d'idées, comme ces éternels travellings typiques de son style d'époque et ses dézoom impressionnants.