Ordell Robbie | 3 | Drôle de Drame |
La mise en scène de La Femme de la brume ne porte pas la marque d'un grand cinéaste. Il s'agit juste le plus souvent d'un bon travail d'artisan classique sans trop de bavures. A une exception près: la séquence d'ouverture où à coup de montage haché et de cadrages penchés la situation de départ se retrouve posée de façon aussi brusque qu'efficace. Les plans contemplatifs et le calme rythmique caractérisant le film se retrouvent également parfois rompus par quelques mouvements de caméra brusques. Sauf que s'il flirte avec la comédie et le mélodrame le film ne cherche jamais l'intensité qu'elle soit comique ou dramatique. L'amour impossible du fils avec une marginale et les femmes/mères courage auraient pourtant pu être prétexte à effusion de mauvais sentimentalisme comme cela a pu être souvent le cas dans le cinéma japonais.
Ce calme, cette retenue se marient parfaitement à un scénario où drame et joies sont insérés dans le quotidien. Ce quotidien des petites gens décrit par le genre shomingeki dont Gosho est une figure emblématique. Pas étonnant dès lors que La Femme de la brume soit surtout le film de Bunkichi tant il incarne un de ces hommes du peuple à la fois homme de sagesse et bon vivant tels que les affectionneront un Imamura ou un Kawashima. Tout est léger pour lui, qu'il s'agisse de montrer à Seiichi l'univers des hôtesses de bar en père initiateur au plaisir, de lui donner des conseils concernant la grossesse de la geisha de son coeur. Ou de résoudre ce dernier problème par une pirouette des plus hallucinantes et hilarantes.
Le gros problème du film est qu'il est moins convaincant dans ses parties mélodramatiques et lorsqu'il bifurque sur la liaison de Seiichi, la faute à une retenue jamais émouvante. Eviter les pièges d'un sujet ne signifie malheureusement pas forcément le transcender.