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Eureka

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les avis de Cinemasie

7 critiques: 3.57/5

vos avis

45 critiques: 3.99/5



Elise 3.5 Excellent mais quand même trèeeeeees long
Ghost Dog 4.5 Ici plus que jamais, il faut faire abstraction de ses préjugés et voir ce film ...
jeffy 2.75 Quelque chose ne passe pas et pourtant...
MLF 1.75
Ordell Robbie 4 Très beau mais pas exempt de pose.
Sonatine 4.5 Un rêve éveillé et une référence du cinéma japonais des années 90.
Xavier Chanoine 4 Prenante et belle, une oeuvre singulière
classer par notes | date | rédacteur    longueurs: toutes longueurs moyen et long seulement long seulement


Ici plus que jamais, il faut faire abstraction de ses préjugés et voir ce film sans se dire que le fait qu’il dure 3H30, qu’il soit japonais et en NB soit un handicap.

Eurêka est en effet une œuvre rare, quasiment jamais-vue. On peut dire que pour son sixième long-métrage, Aoyama a réussi un tour de force exceptionnel en imposant ses choix artistiques et la durée du film à ses producteurs. D’ailleurs, bien lui en a pris car il a eu tout à fait raison. Je rassure tout de suite ceux qui paniquent à l’idée de passer 217 minutes devant ce film et qui ont peur de s’ennuyer : il n’en est rien. Tout d’abord parce que Aoyama insuffle de la vie dans son cinéma par des mouvements de caméra très amples et un choix du noir et blanc « chromatique » agréable à l’œil, qui fait fonctionner le film comme un long rêve éveillé, et d’autre part parce que son histoire s’enchaîne de manière limpide, presque évidente ; tout se tient, tout semble logique, mais on ne sait pourtant à aucun moment du film ce qu’il adviendra le plan suivant.

La vision d’Eurêka occupe donc un après-midi complet ou jusque tard dans la soirée, mais elle est nécessaire. Nécessaire parce qu’elle apporte beaucoup à son spectateur par son aspect si humain qu’elle en devient bouleversante. Aoyama prend le temps d’installer son histoire et ses personnages qui, au fil des minutes, prennent de la consistance jusqu’à devenir des membres de notre propre famille pour lesquels on peut s’émouvoir. Et un peu à la manière de Kitano, il arrive à faire passer ces émotions en étant le moins spectaculaire possible : un simple plan sur les 3 personnages principaux dans le mini-bus partant pour un périple initiatique, ou le regard de la petite fille vers le train qui arrive alors qu’elle est sur la voie nous remue au plus profond, tout simplement parce que la symbolique des images et des idées est très forte.

On peut considérer Eurêka comme une séance de psychanalyse, ou comment retrouver le goût à la vie lorsqu’on est passé si proche de la mort. Sans artifices et sans psychanalystes, les 3 personnages principaux vont tenter seuls de se reconstruire. Un des trois n’y arrivera pas et sombrera dans la folie, mais les 2 autres, à force de courage et de patience, vont petit à petit renouer les liens de communication qui les avait fui un moment après cette prise d’otage. Bref, ce film vraiment est d’une finesse psychologique incroyable, tellement maîtrisée que personne ne peut y rester indifférent (il faut dire que personne n’est à l’abri d’une telle expérience...). Il nous fait comprendre que malgré ces terribles épreuves, il faut vivre tant bien que mal avec cette souffrance enfouie au plus profond de nous, et 3H30 n’étaient pas de trop pour développer ce douloureux sujet. Life goes on...



11 décembre 2000
par Ghost Dog




Quelque chose ne passe pas et pourtant...

Difficile de reprocher quelque chose à ce film aussi bien dans l'esthétique que dans la trame narrative. Pourtant, j'ai été géné du début à la fin et croyez moi ça fait long 3H30 quand quelque chose coince. Dans des scènes où tout semble juste, il reste cette impression d'étriqué, de contrainte. Il me semble que si Aoyama Shinji touche juste avec ce film, c'est parce que le sujet correspond à sa capacité cinématographique, mais qu'au sein de ce sujet il n'a aucune liberté. Non pas qu'il domine son sujet, mais que celui-ci cadre simplement avec ses propres limites de cinéaste. Il n'y a que deux plans dans le film qui me semblent témoigner d'un réel regard, celui du la tige coupée et celui des 4 personnages devant le bus, ce qui ne fait beaucoup pour un film de cette durée (de cette longueur dans mon cas). C'est cette impression qui a gaché ma vision du film, dont l'histoire est par ailleurs magnifique d'humanité. Dommage.

23 août 2003
par jeffy




Très beau mais pas exempt de pose.

Des qualités suffisantes pour être un minimum émouvant, Eureka n'en manque pas: la variété bienvenue amenée par le mélange des genres du scénario, des acteurs excellents -Yakusho Koji en tête-, une superbe Bande Originale, un vrai sens du cadre en Scope et un sépia porteur d'optimisme pour ses personnages. On garde d'ailleurs un souvenir ému de notre découverte du film. Mais avec le recul on aurait tendance à donner en partie raison à ceux qui avaient décelé de la pose dans le film. Tout simplement parce qu'entre temps la découverte de ses autres réalisations a permis de mieux entrevoir les limites du talent d'Aoyama. Repris à l'identique dans d'autres films du cinéaste, les choix formels d'Eureka y sentaient souvent la pose artiste, le cinéaste autosatisfait se regardant filmer. On peut donc désormais revoir Eureka à la lumière de ces ratés-là.

On a encore en tête le cas Kurosawa Kiyoshi qui avait trouvé avec Kaïro un sujet capable de neutraliser une partie de ses mauvais penchants: les contraintes du film de fantômes nippons empêchèrent le déploiement de sa prétention dialoguée et de son goût pour l'image trop facilement symbolique. Ce genre de petit "miracle", Eureka le produit aussi à sa manière. Eureka parle peu, ça évite à Aoyama de glisser ses dialogues puants de prétention et d'être archidémonstratif. Eureka parle d'un lent retour à la normale après un traumatisme. Si cela offre une justification au parti pris de lenteur rythmique du film, le montage est-il alors pour autant exempt de tout reproche? Non, loin de là. Car la tendance à l'étirement des plans lorsqu'il n'y a pas grand chose à voir dans le cadre sent la pose à plein nez. Cette dernière plombe juste Eureka beaucoup moins que d'autres films de cinéaste.

Tout ceci n'enlève donc nullement au film les qualités qui le tirent vers le haut. Mais Eureka est finalement plus une réussite dans laquelle Aoyama ne gâche pas trop son talent que le chef d'oeuvre/révélation d'un grand d'Asie salué en son temps.



15 février 2002
par Ordell Robbie




Prenante et belle, une oeuvre singulière

Lorsque l'on ose l'expérience Eureka, il faut avant tout être prêt à digérer un film très long à la signature évidente, celle d'un cinéaste capable d'offrir quelques grands moments de cinéma contemplatifs, ceux que l'on trouvait chez Tarkovski et que l'on trouve aujourd'hui chez Béla Tarr. Excusez du peu, et si la symbolique du "plan étiré" n'a pas la même signification que chez ces deux grands cinéastes du cinéma mondial, force est de constater que son petit effet "épate" marche du tonnerre pour quiconque approuve cette démarche de cinéaste. On y verra de la pose, il est vrai (il n'y a qu'à voir la dégaine des quatre allongés sur l'herbe, leur placement symétrique devant le bus lors du départ en voyage...), mais pourquoi pinailler? Mettons tout autre film du cinéaste de côté, et jugeons Eureka pour ce qu'il est réellement. Aoyama rentre dans la cours des "grands" de festivals le temps de trois heures trente inspirées, soufflantes malgré un rythme d'ensemble qui tend à la lenteur, la longueur, le renfermement et l'ouverture dans son plus grand paradoxe, festival d'émotions pudiques et retenues, solitaires certes mais que le spectateur analyse parce que Aoyama nous donne cette possibilité. L'étirement des plans laisse ainsi le temps de capter la moindre des émotions, d'un Yakusho Koji formidable d'abnégation à une Miyazaki Aoi ténébreuse et muette. Ce qui marque aussi c'est bien sûr l'aventure que vont vivre les quatre membres de cette "nouvelle famille", des préparatifs au sein du manoir au voyage en bus avec meurtres à la pelle en intrigue sous-jacente, bricole classique histoire d'entretenir un minimum de matière et de suspense pour qu'Eureka ne se transforme pas en film de vacance tourné en scope. Des scènes marquantes, le film n'en manque pas et parvient même à les enchaîner sévère au fur et à mesure que les personnages se séparent : Makoto rassurant Kozue dans son lit, la confrontation Naoki/Makoto seuls dans la nuit, la ballade de Kozue seule sur la plage, et bien d'autres encore hissant le film au rang de vraie réussite marquante du cinéma japonais du début des années 2000. Certains plans rappellent le style de Kitano Takeshi, notamment les champs/contre champs où les personnages se regardent, interloqués, mobiles. La musique planante épouse aussi à merveille la beauté extraordinaire des images, les cadres faisant preuve d'un soin aussi rigoureux que chez les grands maîtres plus connus. Cette tragédie moderne camouflée en poème amer est aussi bien une leçon sur une vie à reconstruire qu'une critique acerbe sur l'Homme laissé de côté. Un moment merveilleux.

 



16 mai 2008
par Xavier Chanoine


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