Alain | 4 | Le The Longest Nite des sentiments |
jeffy | 4 | Jeux de piste |
François | 3.5 | Nuit d'errance |
Ordell Robbie | 1.5 | Au bout de la nuit, pas de grand cinéma... |
A côté de ses splendides réalisations, Stanley Kwan a produit ce film basé sur la nouvelle "The Accident" de Julian Lee. Ce dernier est aussi le réalisateur du film ci-présent mais on peut se demander avec raison si Stanley Kwan n'aurait pas quelque peu débordé de son rôle de producteur tant on retrouve une réalisation presque quasi-identique à son magnifique Hold you tight. Mais mis à part ce fait troublant, "The accident" se permet de facilement tenir tête face aux films du maître.
Car avant tout, The Accident est un film sur l'errance aussi bien physique qu'affective de personnages en proie à leurs démons intérieurs mais Julian Lee nous donne à voir trois versions, trois couples d'un soir dont les issues varieront sensiblement. Gigi Lai incarne au mieux l'esprit d'errance de l'oeuvre: où qu'elle aille, elle ne va que de déceptions en déceptions alors qu'autour d'elle tout semble s'harmoniser pour le mieux créant en elle le sentiment d'une solitude profonde. Paradoxalement, c'est la personne qui s'en sortira le mieux, sauvée pour une nuit par un vieux pilote de ligne qui saura être à son écoute même si cette aspect de confidence est peu explicite. Vient ensuite le chauffeur de taxi qui traverse la ville d'un point à l'autre à bord de son véhicule et se projetant une nouvelle vie avec un gay qui lui laisse entrevoir une vie meilleure en Chine mais ici, on assiste à un jeu entre le désir charnel et les espérances, un jeu où les sentiments se brouillent et s'obscurcissent vite dans la passion d'un soir et laisse les deux protagonistes dans le doute, un doute qui les jettera dans le désarroi le plus profond, brisant en eux toute confiance. Mais face à cette mise à nu des personnages, c'est paradoxalement une actrice de porno (Almen Wong) qui jamais ne révèlera les tréfonds torturées de son âme. Et là, le personnage d'Almen Wong devient quasiment le coeur et l'élément central du film car tel un ange blessé, elle se jettera corps et âme dans une relation vouée d'avance à l'échec tant l'homme d'un soir sur lequel elle jettera son dévolu n'arrivera pas à comprendre toute la détresse qu'il y'a en elle. Au final, tourner une scène d'amour ou de viol reviendra au même tant son esprit s'est déjà exclu de ce monde, rêvant d'horizons lointains.
La lenteur presque hypnotique du film s'accouple assez bien avec un certain dynamisme dans la mise en scène avec des poussées esthétiques et des idées fulgurantes comme lorsqu'un couple anonyme se crashe violemment en moto et que malgré le sang et le chaos, ils cherchent à se raccrocher l'un à l'autre, scène montée en parallèle avec l'étreinte d'un autre couple: là, on touche au sommet de l'art avec cette scène centrale qui résume bien l'esprit du film et place The Accident dans les petites perles injustement méconnues du cinéma d'auteur HK qui méritent franchement d'être découvertes.
Pour son premier film, Julian Lee réussit un très joli coup, avec des histoires croisées et assez tristes, le tout dans une ambiance plutôt réussi, malgré quelques défauts de jeunesse assez compréhensibles.
Le point fort du film est assurément cette ambiance triste véhiculée par des interprètes convainquants. Le film fait se croiser pas mal de personnages, si bien qu'on s'y perd un peu au début. Mais au bout de quelques minutes on comprend mieux les relations entre les protagonistes. Une autre qualité du film est de réussir à garder l'attention sans véritable fil directeur fort, mais avec plusieurs petites histoires. Le montage et la réalisation sont étonnament maîtrisés pour un premier film, même si certains plans ne sont pas du même niveau.
On est aussi agréablement surpris par l'interprétation, d'un très bon niveau et surtout nécessaire au bon fonctionnement du film. Il ne se passe rien de fabuleux dans The Accident, on assiste juste à l'errance d'un groupe de personnes durant une nuit, il faut donc réussir à convaincre via les sentiments des personnages et l'ambiance. C'est chose faite grâce à ce casting qui réunit des noms assez connus, mais pas forcément dans ce registre. Ben Ng livre une excellente performance, Almen Wong se montre plutôt convainquante, Andrew Lin a un peu plus de mal à abandonner ses rôles de méchants à barbichette.
Un autre aspect intéressant du film est son côté assez cru. Mais ici les scènes de sexe ne sont pas un argument commercial, elles s'intègrent parfaitement dans l'histoire et les personnages. Les acteurs se livrent donc corps et âme (même si els scènes en question en sont pas non plus choquantes, loin de là), donnant ainsi une vraie consistance à leur personnage. On n'en ressent que mieux les doutes qui les assaillent et leurs faiblesses.
Donc si vous aimez les films d'ambiances et les histoires d'amour tristes, il y a fort à parier que ce premier film surprenant devrait vous attirer. Même si tout n'est clairement pas parfait, il y a tout de même une vraie ambiance, et de bonnes performances d'acteur autour de rôles intéressants. Bref, ce premier film est bien tout sauf un accident.
Une tentative comme the Accident est louable dans un contexte hongkongais où le cinéma d'auteur a peu d'espace pour se développer mais à la fin du visionnage de ce qui n'est qu'un film d'auteur(isant) de plus on en vient à se dire que les calculs mercantiles (d'un Johhnie To notamment) peuvent parfois produire des oeuvres pesant plus cinématographiquement que d'autres aux intentions de départ arty.
Tout le propos de the Accident sent en effet le cliché thématique d'un certain cinéma de festival, celui des disciples peu inspirés d'Antonioni et celui d'une vague asiatique que la notoriété festivalière de Tsai Ming Liang a initiée: difficulté à rencontrer l'autre dans une grande capitale, solitude des êtres, difficulté à vivre son homosexualité, incommunicabilité. A ces clichés thématiques qu'il n'arrive pas à renouveler ou à traiter de manière originale, le film de Julian Lee ajoute un cliché de dispositif, celui du croisement d'histoires et d'individus usé jusqu'à la corde par les suiveurs de Tsai et Wong Kar Wai, dispositif appliqué ici de façon peu inspirée. D'un point de vue formel, on est là encore dans le cliché visuel: photographie ultraléchée eighties déjà datée, multiplication des cadrages penchés en forme de tics de mise en scène et travellings urbains nocturnes sentant le cliché visuel wongkarwaien de cinéma asiatique de festival des années 90.
Du point de vue rapport entre les personnages, également rien de palpitant avec la relation homosexuelle qui ne débouche que sur un commentaire tout sauf neuf concernant les différences Hong Kong/Chine continentale (HK vue par le continentaux comme terre d'espoir qui finit par apporter ses désillusions), la jeune femme qui trouve de l'écoute et de quoi se rassurer chez un homme plus âgé qu'elle, la star du porno qui n'arrive pas à faire comprendre aux hommes qu'elle a aussi des doutes, des moments où elle se sent seule et une sensibilité. Ce qui n'aurait pas été grave si les acteurs avaient pu un minimum transcender les enjeux du film. Or ici les prestations oscillent entre correct et pas mal.
D'où un film qui se laisse regarder mais s'oublie aussitôt achevé, intéréssant dans ses intentions parce qu'à contre courant du cinéma produit par l'industrie locale mais qui si on fait abstraction de ce contexte n'est qu'un film d'auteur asiatique de plus.
visiteur | note |
Secret Tears | 3.25 |
chronofixer | 2.5 |
Manolo | 2.5 |