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2046 comme on ne le verra jamais, ou "comment en vouloir sérieusement à WKW..."

27/05/05 20:33 

par Aurélien

Immédiatement après m'être procuré le DVD collector de 2046, je me suis bien entendu précipité sur les (peu nombreuses) images inédites. En fait, le reste, peu importe. Tout ce que j'attendais depuis la sortie en salle de ce film, c'était de voir enfin ce que l'on n'avait justement pas vu.

Le film m'a fort plu mais je suis quand même sorti de la salle avec un goût fort amer (j'ai même commencé une critique il y a six mois et ne suis jamais parvenu à la terminer tellement je suis partagé) : il m'a semblé clair que, malgré les qualités nombreuses de 2046, ce film n'était pas terminé et, comme l'a dit son auteur, ne le serait jamais.

J'étais en fait loin, très loi, vraiment très loin du compte. Difficile d'imaginer toute l'admiration que je peux avoir pour Wong Kar-wai depuis que j'ai vu Fallen Angels. Certainement aussi difficile que d'imaginer l'immense frustration (d'un degré rarement atteint, je suis sérieux !) après avoir vu le teaser de 2003 de ce film sur le DVD des bonus.

Pour ceux qui ne l'ont pas vu, ça dure 7 minutes et, de tout ce que l'on voit (et entend !), il ne reste rien. Ah, si ! Pardon, il reste cinq secondes avec Maggie Cheung.

Rien de surprenant me direz vous... Oui, je sais... La version sortie en salle de In the Mood for Love correspond par exemple à seulement 10 % des images tournées.

Là n'est pas le problème.

C'est peut-être moi qui m'emballe mais ces 7 minutes que l'on voit sont à la fois merveilleuses et insupportables.

Merveilleuses et insupportables car on a le sentiment que Wong Kar-wai était visiblement décidé à nous proposer un film réellement expérimental, dans le fond comme dans la forme. Les mouvements de caméra sont originaux, travaillés, surprenants. Les acteurs sont tous plus beaux les uns que les autres. je pense particulièrement à Faye Wong : je ne l'ai jamais trouvée particulièrement belle et elle est ici absolument radieuse et de toute beauté (ne craque pas Jeffy, on se calme... :D)... Les costumes sont particulièrements beaux et l'on voit une Carina Lau, une Maggie Cheung, un Chang Chen et un Tony Leung avec des costumes et des situations plus que surprenants. Les scènes sont d'une sensualité parfois plus que troublante et l'on se prend à rêver de voir un nouveau 2046. Certaines scènes surprennent étrangement, comme celle où un Tony Leung habillé un peu comme un cow-boy (!!!) parle avec une Faye Wong absolument craquante. De nombreux événement étaient présentés et l'on nous parle d'une ville de vice : argent, etc... Un film qui s'annonçait bien sombre et riche ne rebondissements.

Originalité, inventivité, renouveau, expérimentations, sensualité sont les termes que j'aurais employé après avoir vu ce teaser avant la sortie du film. Ce sont les mots que j'utilise aujourd'hui pour décrire ce que WKW n'a pas réussi à nous offrir.

Je précise que ce teaser laisse entrevoir un film *vraiment* beaucoup plus sombre que celui finalement sorti.

Je suis déçu, très déçu, car 2046, s'il restera l'un de mes coups de coeur de l'année passée, perd toutefois de son brillant et me semble aujourd'hui particulièrement terne et décevant...

Finalement, alors que je ne comprenais pas vraiment des critiques comme celle de François avant cela, je dois avouer qu'après avoir revu le film et surtout ces scènes inédites, en effet, il est incontestable que 2046 est un film malade qui n'aura finalement jamais été achevé correctement, peut-être parce que WKW ne savait pas quel visage donner à ce projet malgré tous les choix possibles (peut-être trop nombreux) qu'il avait.

PS : quand on voit que *toutes* les scènes de Maggie Cheung incluses dans le film ont été tournées en 2002 (oui ! en même temps qu'In the Mood) et que cette dernière a passé de longs mois à HK pour tourner d'éventuelles nouvelles scènes (dont l'été dernier un mois et demi en vain), je comprends qu'elle pête un cable...


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27/05/05 22:22 RE: 2046 comme on ne le verra jamais, ou "comment en vouloir sérieusement à WKW..."

par jeffy

C'est dommage d'avoir des regrets en regardant un film, surtout un de la trampe de 2046. Maintenant que le film soit inachevé quelque soit le sens que l'on donne à ce mot, je suis d'accord là-dessus. Mais n'est-ce pas aussi un droit de l'artiste? N'ayant pas vu le trailer dont tu parles (je peux venir un de ces soirs?), je ne me prononcerait pas sur le film que 2046 aurait pu être. Mais comme beaucoup je reste convaincu que le 1er avril 2003 aura été pour beaucoup dans le remaniement que WKW a commencer à mettre en oeuvre peu après. Plus que tous ses autres films, 2046 est un film sur la perte, sur le vide, sur une douleur laissée béante, un film qui nécessairement ne pouvait se conclure car WKW ne fait pas parti de ceux qui peuvent oublier si facilement.


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28/05/05 00:17 RE: 2046 comme on ne le verra jamais, ou "comment en vouloir sérieusement à WKW..."

par Aurélien

En fait, ce ne sont pas vraiment des regrets... C'est juste que le trailer dont je parle (oui, tu peux passer si tu veux :D) dégage l'impression d'un travail de visionnaire. Je ne sais pas ce qu'aurait donné le film si WKW avait continué dans le sens de ce trailer, et personne ne le saura jamais. Ce que l'on sait, c'est que, comme indiqué sur le livret du coffret, il a ensuite pris une toute autre direction.

Mon titre n'est pas vraiment représentatif de ce que je pense. Je n'ai d'ailleurs pas de reproche à faire, 2046 est un film qui classe sont réalisateur parmi les plus grands cinéastes actuels. Pour moi, WKW est un génie. Mais pas dans le sens où je trouve parfait tout ce à quoi il touche, loin de là.

Aucun de ses films n'a par exemple pour moi la maîtrise, formelle dans ce cas, d'autres oeuvres qui sont en tout point réussies. Quand je suis sorti de la salle de Memories of Murder, je me suis dit "voilà un film brillant, totalement maîtrisé, à la réalisation parfaite". C'est un exemple. A chaque fois que j'ai vu un WKW, j'ai eu un goût amer à la sortie. C'est l'impression que j'ai quand je vois l'oeuvre de quelqu'un que je suspecte d'être un génie. Pour moi, WKW en est un et cela ne veut absolument pas dire que ses oeuvres sont parfaites, loin de là.

Ce qui fait, à mes yeux, de lui un véritable artiste, c'est la vision qu'il a des choses et comment il nous la présente.

Pour moi, In the Mood for Love reste à ce jour le film le plus sensuel que j'ai vu. Paradoxal. Oui.

Ce qui me fait mal avec ce teaser, c'est que l'on voit le travail d'un artiste qui prenait visiblement un chemin original par rapport à l'ensemble de son oeuvre. Ce teaser est pour moi l'oeuvre d'un visionnaire, l'oeuvre de quelqu'un qui voulait montrer quelque chose de nouveau, de jamais vu, de beau, d'extrêmement beau.

Tellement beau et original, que le film que j'ai vu et beaucoup aimé me semble aujourd'hui un petit peu fade.

Car, oui, finalement, 2046 ressemble beaucoup à In the Mood for Love. Ce n'est pas un défaut. Mais ce film ne prenait pas du tout ce chemin.

Alors, une question : pourquoi ?


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28/05/05 00:37 RE: 2046 comme on ne le verra jamais, ou "comment en vouloir sérieusement à WKW..."

par François

Que l'artiste n'arrive pas à finaliser son oeuvre, soit, mais qu'il sache en gros là où elle va, c'est une autre chose. A voir le film et tous les bonus du DVD, on voit que du départ WKW ne savait pas du tout où il allait. Il filmait, point. Ensuite la question a été de savoir quoi faire de ces images. A la limite c'est un nouveau concept de cinéma, pourquoi pas. Mais je suis comme Aurélien, il y a des passages intéressants dans ces BA, tout comme d'autres inutiles (j'adore la voix off qui parle vraiment pour le rien dire, c'est là qu'on voit la vacuité du projet, la bande annonce ne repose sur rien si ce n'est la beauté des images). A l'arrivé l'orientation prise pour le film est batarde évidemment, non finie, longue, trop compliqué pour ce qu'elle a à dire, c'est à dire pas grand chose. WKW avait sûrement des choses à dire, mais les images qu'il avait en boîte ne correspondaient pas forcément à son message. Je suis nostalgique des 2 semaines de tournage de Chungking Express, de la limpidité même du film, sa simplicité et pourtant sa richesse.


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28/05/05 10:45 RE: 2046 comme on ne le verra jamais, ou "comment en vouloir sérieusement à WKW..."

par jeffy

> Que l'artiste n'arrive pas à finaliser son oeuvre, soit, mais qu'il sache en gros là où elle va, c'est une autre chose

Sur le principe je ne vois pas pourquoi le doute ne pourrait pas non plus s'exprimer par la forme même du film. Le plus génant avec 2046 est surement qu'il n'existe que par réference au passé filmographique de WKW. Quelqu'un qui aborderait WKW par ce film risquerait d'être dégouté à vie. Mais quoi qu'il en soit je ne connait pas d'autre auteur qui sache rendre aussi justement l'absence. Ca ne m'empêche pas d'être d'accord avec toi sur Chungking Express, gardes espoir peut-être que son prochain film saura te garder plus éveillé ;-)


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28/05/05 14:59 RE: 2046 comme on ne le verra jamais, ou "comment en vouloir sérieusement à WKW..."

par Tomtom

L'espoir fait vivre : peut-être que les images manquantes se trouvent dans son sketch du film EROS, film à sketches justement, réalisé par Wong Kar Wai, Antonioni, et Soderbergh...


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28/05/05 20:23 RE: 2046 comme on ne le verra jamais, ou "comment en vouloir sérieusement à WKW..."

par Thingol

>Quelqu'un qui aborderait WKW par ce film risquerait d'être dégouté à vie.

C'est le premier film de WKW que je vois, et étrangement, j'ai été happé par la profondeur du film, mais j'ai ressenti cette frustration, comme si 2046 était délibérément superficiel, ou en tout cas tronqué. Paradoxal me direz-vous :)


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31/05/05 14:31 RE: 2046 comme on ne le verra jamais, ou "comment en vouloir sérieusement à WKW..."

par Tomtom

A noter que "Eros" sort le 6 juillet sur nos écrans. Dure sortie puisque le même jour que La guerre des mondes (spielberg et cruise), Mindhunters (harlin), la moustache (carrère et lindon) ou millions (boyle). Rien que ça !


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