Interview Karena Lam

Avec seulement quelques films à sa filmographie, Karena Lam a déjà tourné avec quelques uns des plus grands noms de la profession et gagné deux Hong Kong Awards. François s'est entretenu longuement avec elle sur sa carrière et ses projets. Découvrez ce nouveau visage au travers des 7 chapitres de cette interview:
Avant les films Sa Carrière
July Rhapsody Le cinéma de Hong Kong
Inner Senses Ses projets récents
Tiramisu  

Francois: J'aimerais tout d'abord commencer par votre carrière avant les films, car il n'est pas très facile de trouver des informations, même en anglais. Donc corrige moi si je me trompe. Tu es née et as été élevée au Canada, c'est exact?

Karena: Oui

F: D'un père Sino-Hong Kongais et d'une même Sino-Japonaise, c'est exact?

K: Une mère taiwanese/japonaise

F: Ok. Ensuite vous êtes parti à Taiwan où vous avez débuté une carrière de chanteuse, avec un premier CD en 1995, puis vous êtes revenu au Canada pour étudier la musique, puis retourner à Taiwan pour un second CD en 1999, pour finalement commencer une carrière d'actrice à Hong-Kong. C'est exact?

K: Oui, c'est exact. C'est bon (en Français dans le texte)

F: Pardon? (<-- les effets néfastes d'un réveil très matinal)

K: C'est bon? (en Français dans le texte) C'est comme ça que vous dites?

F: (Rires) oui, c'est exact, “c'est bon”.

 
F: Maintenant, j'aimerais vous poser quelques questions sur vos premiers film. Commeçons par July Rhapsody. Pouvez-vous nous dire comment vous avez été impliquée dans le projet ?

K: En fait, grâce au producteur Derek Yee. Il m'a vue dans un clip musical, donc il m'a contacté. Je suis allé à Hong Kong pour un essai, Ann n'était pas là, j'ai rappelé Derek ensuite, il était d'accord, mais finalement nous sommes repartis à Taiwan. C'est drôle parce qu'au début, il trouvait que j'étais trop gentille pour le rôle. Alors je lui ai dit que je n'étais pas gentille du tout, je lui ai parlé de mes expériences passées, mes propres expériences. Finalement il a été convaincu, et j'ai eu le rôle dans July Rhapsody. Donc en gros, tout a commencé avec Derek Yee.

F: Et concernant votre travail avec Ann Hui, elle est réputé pour être une excellent directrice d'acteurs, donc j'imagine que vous étiez heureuse de débuter votre carrière avec elle.

Karena Lam in July Rhapsody
K: C'était assez intimidant de travailler avec Ann en fait, parce que je savais que c'était une des toutes premières réalisatrices à Hong-Kong. Donc j'imaginais que c'était quelqu'un de très dur et exigeant, pour avoir réussi à survivre dans l'industrie du cinéma depuis si longtemps. Elle a une réputation très solide, mais travailler avec elle fut un vrai plaisir, parce qu'elle est très nature, très vraie comme personne, très libre d'esprit, comme lorsqu'elle veut rire, elle va rire très fort, en tapant du pied par terre et en s'écroulant de rire.

Et c'est une personne avec un gros coeur, et c'était vraiment agréable de travailler avec elle, car elle m'a donné beaucoup de liberté. Comme c'était mon premier film, j'avais beaucoup de choses à découvrir, donc elle m'a laissé découvrir le rôle et tout ce qu'il y avait autour, sans trop me limiter. C'était une excellente expérience de travailler avec elle.

 
F: Et j'imagine que c'était également intimidant de travailler avec Jacky Cheung et Anita Mui. Ce sont de très grands noms dans le show business à Hong Kong. Ce n'était pas trop difficile de jouer avec eux?
K: En fait, c'est dommage parce que je n'avais pas de scènes avec Anita. Mais concernant Jacky, je l'avais déjà rencontré quand j'avais 16 ans, donc je n'étais pas intimidée. J'étais plus excitée qu'intimidée en fait. C'était comme un jeu de travailler avec eux.
F: Vous appréciez Jacky avant ? Vous vous êtes bien entendus sur le tournage?
K: Nous sommes dans la même maison de production, donc je le connaissais. Je l'avais déjà rencontré quelques fois avant de faire le film. Donc on se connaissait déjà un peu. Mais c'était agréable de travailler avec lui, parce que de nombreuses fois sur le plateau, je disais à Ann que je ne voulais pas lui dire ce que j'allais faire dans la scène suivante, et elle me disait “Ok, ne lui dis pas, je veux de la spontanéité”. C'était très drôle, parce que Jacky était du genre “Ok, si tu ne me dis pas, alors je vais te donner ???”. Je n'étais pas intimidée du tout, il est très agréable pour le travail.

F: Comment vous-êtes vous préparée pour le personnage de July Rhapsody? J'imagine que ce n'est pas facile d'imaginer comment séduire un homme de quarante ans. J'imagine que vous ne deviez pas avoir trop d'expérience de ce genre.

K: En fait, ce n'était pas forcément si difficile, c'est un peu, vous savez, la nature féminine. En fait, je devais travailler dur parce que je n'avais pas vécu à Hong-Kong, je n'y ai pas été élevée. C'est très différent du Canada où j'ai été élevée.

Karena dans July Rhapsody

En fait, avant le film, deux semaines avant environ, j'ai passé un peu de temps avec d'autres étudiants, plaisanté avec eux, fais du shopping, des jeux videos. Je leur posais beaucoup de questions. Les adolescents à Hong-Kong parlent beaucoup avec de l'argot, ils ne parlent pas un très bon cantonais. Donc j'ai eu à apprendre l'argot. J'ai donc tout simplement passé du temps avec eux, juste pour discuter, et leur poser beaucoup de questions. C'était très drôle.

Et j'ai aussi appris à dessiner, car dans le film, mon personnage a un carnet, elle dessine tout le temps les gens autour d'elle. Il y avait un artiste qui faisait les dessins, et Ann m'a demandé si je savais dessiner. Je lui ai répondu que je pouvais essayer de gribouiller quelque chose. Elle a vu mes dessins, et elle a dit qu'on pouvait les utiliser. Donc j'ai dû m'entraîner au dessin, c'était très amusant.

 
F: Pour Inner Senses, votre personnage est vraiment différent de celui de July Rhapsody, spécialement au début du film. Etait-ce facile de passer d'un personnage à l'autre?

K: Non, ce n'était pas facile du tout. En fait, j'avais très peur. Je pensais que je n'y arriverais pas, parce que j'avais joué une étudiant, et je devais changer pour un personnage très différent, très sensible et très vulnérable. C'est assez difficile. Honnêtement, j'ai beaucoup douté, tous les jours sur le plateau je demandais à Law Chi-Leung le réalisateur "tu es sûr?", si c'était bon, si je
Karena Lam dans Inner Senses
me débrouillais bien. Il m'a donné beaucoup de confiance et d'opportunités. Je le remercie beaucoup pour ça. Et j'ai senti qu'il m'aidait pour me prépare pour le rôle, parce que lorsque je suis arrivée à Hong-Kong, je ne parlais pas un cantonais parfait. Et c'était normal de parler en argot pour July Rhapsody, parce qu'il fallait parler un cantonais très local. Donc j'ai du relire le script tous les jours pendant une heure avant que nous commençions à filmer.

Ensuite, je suis allée dans un hôpital psychiatrique, pour observer et me préparer pour le rôle, et je me suis senti comme déprimée. Cela m'a vraiment ouvert les yeux, car c'était je pense le but de ma visite dans l'hôpital. Dans le film, elle ne pense pas qu'elle est folle, et elle se sent complètement honnête avec elle-même et personne ne la croit.

Donc quand j'étais dans cet hôpital psychiatrique, j'y restais disons 10 minutes, parce que je sentais que je n'y étais pas chez moi, et je me sentais tout à fait normale, pas folle du tout, donc j'avais du mal à comprendre ce que j'y faisais. C'était un sentiment très incomfortable et dérangeant. Après ces visites dans l'hôpital, j'ai été jouer pour July Rhapsody, je ne sentais assez mal et que je n'étais pas à ma place.

Mais le plus effrayant c'était d'aller à cette clinique. J'y allais avec Law Chi-Leung et son assistant, et ils me laissaient là-bas, on rentrait tout simplement, comme des visiteurs, et je restais assise au milieu de la pièce, j'observais tous les petits mouvement, je travaillais, tout simplement. Cela m'a beaucoup aidé.

 
F: J'imagine qu'on a dû vous poser beaucoup de questions au sujet de Leslie Cheung, votre relation avec lui pendant le tournage, sa mort soudaine et tout ça. Je ne vais donc pas m'étendre là-dessus. Mais juste une question, comment vous sentez-vous d'être en fait sa dernière partenaire à l'écran ?
K: Je ne sais pas... Sa mort si soudaine. Je suis très choquée. Tout le monde l'est. Comme je l'ai connu au travers de ses films et en tant que personne.... Je ne sais pas. C'était un honneur de travailler avec lui. Et de le cotoyer. Après le film, nous avons continuer à nous voir. Il était si gentil, c'est une personne tellement passionnée. Comme il savait que je n'étais pas de Hong-Kong, il m'invitait toujours à dîner, à faire du shopping, etc... Donc j'ai beaucoup de regrets, c'est difficile à exprimer. On dirait qu'il ne nous a jamais quitté en fait.
 
Tiramisu
F: Ok, passons à un autre sujet. Pour Tiramisu, pourquoi avoir choisi un autre film de fantôme? Pour l'approche romantique ?
K: Et bien, j'ai voulu participer à Tiramisu à cause de Dante Lam, il n'avait jamais réaliser de romance, seulement des films d'action. Et c'était aussi à cause de Nicolas Tse, je voulais travailler avec lui. C'était une bonne opportunité. C'était très différent de Inner Senses, parce qu'Inner Senses était un thriller, et pour Tiramisu, l'approche était plus romantique / fleur bleue, c'était un genre bien différent et j'essaye de m'essayer à tout ce qui est différent.
F: C'était aussi pour avoir un vol gratuit vers la France ? (sourire)

Karena and Nic dans Tiramisu
K: Oui, le château en France... Nous avons été à Chambord, Pierrepont. Nous sommes restés une semaine environ. C'était très bien, et mon premier séjour en Europe, ma première fois en France. J'ai eu beaucoup de regrets, parce que nous avons du repartir très vite à Hong-Kong. Après la France, je suis allée à Berlin, puis à Hong-Kong. Je voulais rester quelques jours, mais je n'ai pu passé qu'une journée à Paris. Et j'étais si indécise, je voulais voir tellement d'endroits, et je n'avais qu'une journée, je voulais tout voir, je disais “Non, je veux aller là”, je m'amusais beaucoup, il pleuvait beaucoup, nous n'avions pas de parapluie, mais je m'en fichais, je me promenais dans les rues. J'ai visité autant d'endroits que possible jusqu'à sept heures. Je me suis beaucoup amusée. Mais lorsqu'on me demande “C'était comment Paris ?”, je réponds “Je ne sais pas”, parce que j'ai tout vu si vite. Mais j'ai pu tout de faire voir quelques marchés.

F: J'imagine que si vous avez une autre opportunité de tourner en Europe, vous reviendrez et en profiterez plus ?
K: Oui j'aimerais bien. Pendant le tournage à Chambord et à Pierrepont, c'était vraiment magnifique. Nous avons acheté un gros Brie, nous l'avons fini en cinq jours. C'était tellement bon! Nous avons bu du café, du vin, c'était vraiment très bien. Je me dis toujours qu'à Hong-Kong, nos plannings sont si chargés, mais en France, je trouve que les gens savent comment à la fois travailler dur et s'amuser beaucoup en même temps. C'est génial.
F: Comme enfer, c'est plutôt sympa donc ? (NDLR: la France représente l'enfer dans le film)
K: Oui ça va.

Sa Carrière
F: Avant de parler de vos nouveaux projets, j'aimerais vous poser quelques questions sur votre carrière. Qu'est-ce que cela fait de commencer sa carrière avec Jackie ou Leslie? C'est un début incroyable, n'est-ce pas ?

Karena Lam dans Inner Senses
K: Je pense que j'ai vraiment beaucoup de chance. Quand j'étais à Hong-Kong pour July Rhapsody, pour être tout à fait honnête, j'avais mes bagages prêts chaque jour pour repartir. Je pensais tout le temps à partir et revenir à Taiwan, parce que j'imaginais que juste après July Rhapsody, je retournerais à Taiwan et je reprendrais le travail. Donc tout s'est passé si soudainement, dans la continuité, juste après la fin du tournage de July Rhapsody, j'ai été auditionnée et choisie pour le rôle de Tiramisu, je voulais repartir à Taiwan, Dante voulait me rencontrer, donc ça n'a jamais arrêté, et je suis restée finalement.

Je suis arrivée à Hong-Kong en Juillet, et à Noël j'ai décidé de m'installer à Hong-Kong. Tout est arrivé si vite et de manière si naturelle, c'était vraiment inespéré, je pense que j'ai beaucoup de chance. Je pense que je me suis mise beaucoup de pression, parce que lorsqu'on vous donne une opportunité, il faut faire de son mieux, au lieu d'en profiter. Donc j'espère pouvoir essayer tous les genres de films Je me demande toujours “Qu'est-ce que je vais pouvoir apprendre sur ce projet?” et ensuite “est-ce que cela vaut la peine?”, et ensuite je décide. J'ai vraiment eu beaucoup de chance jusqu'à présent.

F:Ensuite vous avez gagné deux Hong Kong Awards dans la même soirée. Cela a pris plus de dix ans à un acteur comme Andy Lau pour en gagner ne serait-ce qu'un seul. Qu'est-ce que vous en pensez ?
K: Que j'ai eu beaucoup de chance.
F: Mais quand vous gagnez un award, c'est une espèce de reconnaissance pour un travail bien fait non ?

K: Quand j'ai gagné le prix de la meilleure débutante, je me suis dit “Ok, n'oublie pas de remercier toutes les personnes que tu dois remercier”. Mais malheureusement, j'étais si nerveuse, je regardais toutes ces personnes que j'admire, j'ai vu leur films, je me suis sentie si petite, j'ai remercié tout le monde sauf ma famille et mes amis, donc quand je suis rentrée à la maison, j'ai eu trois jours difficiles.

Mais quand j'ai eu le prix du meilleur second rôle féminin, j'étais un peu triste en fait, parce que je pensais que tout m'arrivait trop vite, et je ne pensais pas le mériter, c'était vraiment trop soudain. Je n'étais pas fâchée, mais je pensais que je ne le méritais pas. Je sais que c'est une réaction étrange. Mon entourage me disait “Pourquoi es-tu triste, pourquoi n'es-tu pas heureuses?”. Je n'ai pas ramené ces prix chez moi parce qu'une fois descendue de scène, je les ai donnés à ma maison de production, et ils y sont exposés.

Je voulais prendre un nouveau départ à chaque fois, réapprendre les choses de zéro, je ne veux pas me dire “il y a deux ans, j'ai eu ce prix, etc... etc...”. Je ne veux pas devenir comme ça à cause d'un prix, et ne plus avoir à travailler dur. Je veux tout reprendre de zéro à chaque fois.

F: On dirait que vous voulez travailler encore plus dur pour justifier ces prix peut-être? Vous voulez vous prouver que vous les méritez ?
K: Oui. Je veux percer à chaque fois, et apprendre beaucoup à chaque fois. Je peux dire que je me mets beaucoup de pression, mais je pense que c'est aussi une motivation, pour toujours avancer, avancer, avancer. Et j'aime beaucoup faire des films, c'est vraiment génial. Combien de fois peut-on avoir un travail qu'on aime tellement et qui vous permette de vivre ? C'est la plus belle chose au monde.

F:Vous ne ressemblez pas à la majorité des jeunes actrices Hong Kongaise. Je veux dire que vous n'êtes pas anorexique, vous semblez plus mature. Vous avez beaucoup voyagé, vous avez été élevé au Canada, vous avez vécu à Taiwan. Est-ce un avantage pour vous et est-ce une des raisons de votre succès?
K: Je pense que ça a vraiment eu un impact sur moi-même en tant que personne. En ayant été élevée au Canada, en ayant vécu à Taïwan pour autant d'année, en venant à Hong-Kong, j'ai vu tellement de chose, j'ai pu être en contact avec beaucoup de personnes et de cultures. Je pense que ça a eu un gros impact sur moi et mes valeurs, moi en tant que personne. J'ai vu toutes sortes de choses pendant ma vie. Je pense que pour un acteur ou une actrice, la meilleure façon d'apprendre à bien jouer est de tout simplement vivre, n'est-ce pas? Si vous n'avez pas vécu, vous ne pourrez pas comprendre certaines choses. Si je devais jouer quelqu'un qui lave la vaisselle et que je n'ai jamais lavé de vaisselle de ma vie, comment pourrais-je le jouer ?
 
F: Maintenant quelque chose de totalement différent. Je crois savoir que vous préparez un nouveau CD en cantonais, c'est exact?
K: Oui, le CD sort en Août, mais je n'ai pas commencé à enregistrer. Je commence la semaine prochaine. Je suis assez nerveuse. (NDLR: l'enregistrement a été repoussé à l'automne depuis)
F: Et qu'est-ce que vous préférez? Chanter ou jouer ?

K: Je donne la priorité au cinéma. Je sais que c'est dur de dire ça, mais ma maison de production roule toujours des yeux quand je dis ça, mais pour être honnête, les films sont plus importants. Je n'ai pas commencé à enregistrer mon CD, et je ne me sens pas prête pour. Chaque fois que je prépare pour un travail, je commence toujours par une préparation,et quand je me sens prête, alors j'y vais. Mais pour chanter, je n'ai pas encore commencé, nous enregistrons la semaine prochaine, donc je vais enregistrer pendant le mois prochaine probablement, donc je vais me sentir plus chanteuse.

Mais être une chanteuse est beaucoup plus personnel, donc je pense que j'ai un peu peur. Pour les films, ce n'est pas moi, c'est un personnage. Je dois beaucoup compter sur les costumes, le maquillage, l'éclairage, les autres acteurs, etc... Mais pour chanter, je pense que je suis encore dans la positon où j'ai peur. J'ai peur de le faire maintenant. C'est tellement plus personnel. La voix, être toute seule pour enregistrer. Chanter, c'est comme dire aux gens ce qu'on pense. Et je n'aime pas vraiment que les gens sachent ce que je pense.

F: Oui bien sûr, ils savent ce que vous pensez, et vous ne savez rien d'eux. Ce n'est pas très juste.
K: Oui, ce n'est pas vraiment juste. Pour moi, chanter sur scène, là maintenant, c'est comme d'être nue sur scène. Les gens sont là pour vous écouter. Pour un rôle, les gens pensent “Oh, elle joue juste un rôle”, ils ne pensent pas que c'est vous. C'est vrai non ? C'est beaucoup plus personnel de chanter.
F: Mais comment voyez-vous votre carrière ? Plutôt comme une actrice ? Ou comme une chanteuse ? Les deux peut-être ?
K: Je ne sais pas. Apparamment, je me vois plus comme une actrice, mais je change toujours, donc on ne sait jamais. Peut-être après quelques albums, j'aurais envie de me concentrer plus sur la chanson. Je ne peux jamais prédire ce qui va arriver demain. Mais pour le moment, les films sont ma vraie priorité.
F: Non, je ne fais qu'enregister la voix. Je n'ai pas de talent d'écriture en quoi que ce soit. Je ne vais pas me dire “Oh, je veux faire ça”... Non non non, je laisse ça aux professionnels.
K:No, strictly recording lyrics. I’ve no talent in writing whatsoever. I’m not gonna go like “Oh, I want to do this…”, no, no, no, I’m just gonna leave it to the professionals. I’m letting them handle it.
 
Le Cinéma de Hong Kong
F: Parlons un peu du cinéma de Hong-Kong en général. On vous a vue dans deux films de fantômes déjà. Une fois comme fantôme, et une fois vous en voyez. Vous ne pensez pas qu'il y a un peu trop de films de ce genre à Hong Kong depuis quelques mois?
K: Comme the Eye et les autres ? Trop de films de fantômes?
F: Oui, l'année dernière, il n'y a eu presque que des comédies et des films de fantômes à Hong-Kong et ce n'était pas facile d'en trouver des bons...
K: Je pense que c'est une coincidence. Si un film d'épouvante ou un film de fantôme a un gros succès, alors dix autres studios vont faire des films de fantômes. C'est juste une mode. Les modes démarrent parce que quelqu'un a du nez et prédit que le film marchera, et lorsque ça marche fort, tout le monde commence à suivre la mode. Ca arrive.
F: Quand on regarde le box office récemment, il y a Sammi Cheng, la reine du box office, il y a Myriam Yeung, la nouvelle reine de la comédie, et il y a de jeunes actrices comme vous et Angelica Lee qui ramassent tous les Awards. Il y a une sorte de “girl power” à Hong-Kong, non ?
K: Je ne sais pas, vraiment. Je n'y ai jamais pensé. J'ai toujours pensé que ce milieu était dominé par les hommes. Mais peut-être que c'est comme au Canada, les choses changent maintenant.
F: Oui, la culture à Hong Kong est plutôt dominée par les hommes, mais si on regarde les chiffres, ce sont les femmes qui mènent la danse dans le cinéma Hong-Kongais maintenant. C'est plutôt drôle.
K: Oui plutôt. Tant que les films Hong Kongais ont du succès, c'est une bonne nouvelle. Si vous continuons à faire de bons films, c'est déjà une très bonne nouvelle.
F: J'ai entendu dire que vous seriez intéressée pour jouer dans un film japonais comme vous aimez beaucoup le Japon. Il y a de plus en plus de collaborations entre pays asiatiques pour produire des films. Qu'est-ce que vous en pensez ? Est-ce que vous aimeriez jouer dans un film à la fois Japonais et Hong-Kongais ? Ou Taiwanais?
K: C'est toujours une bonne opportunity, parce que c'est une occasion d'apprendre, et aussi une chance d'accéder à un nouveau public. Et je pense que chaque réalisateur a une manière de travailler bien différente, c'est donc enrichissant à chaque fois, et j'aime travailler. Cela ne me gênerait pas de travailler sur des coproductions. Actuellement je suis en discussion pour des projets à l'étranger, et j'espère que ça va bien se passer, je croise les doigts. J'aimerais bien y participer.

F: Le cinéma de Hong Kong est en train de traverser la pire de ses crises en ce moment. Etiez-vous une fan de ces films avant ? Et pensez-vous que l'industrie survivra face à la concurrence?

K: Oui, elle survivra, nous survivons toujours. Mais cela prendra beaucoup de temps pour trouver de nouvelles façons d'attirer le public. Je pense que le public à Hong Kong est assez étrange. Récemment, je comprends qu'il ait envie de voir plus de films étrangers, car les gens sont coincés à Hong Kong (sourire). Mais c'est une bonne chose aussi car cela signifie des entrées d'argent. J'espère vraiment que l'été sera fructueux.

F: Vous avez joué avec des acteurs de l'ancienne génération, comme Waise Lee, Jacky Cheung, Leslie Cheung, et aussi avec des acteurs de la nouvelle génération, comme Nic Tse et Eason Chan. Y a-t-il une différence dans leur façon de travailler?
K: Oui, ils sont différent je pense. J'ai commencé avec Jacky et Leslie. Je ne sais pas vraiment comment expliquer la différence, mais elle existe. Avec Nicolas, nous avons l'impression d'apprendre ensemble. Mais avec Jacky et Leslie, j'apprends beaucoup à leur contact. Ils sont si passionnés, et comme ils savent que vous êtes nouvelle, ils partagent volontiers sur la façon de bien jouer. C'est juste une façon différente de travailler parce qu'ils ont plus d'expérience, leur mentalité est différente.  
F: Vous ne pensez pas que vous avez rendu trois générations de Hong Kongaises jalouses en séduisant Leslie Cheung, Jacky Cheung et Nicolas Tse dans vos trois premiers films? C'est un peu dangereux non ? :-)

K: (Rires). Je me suis beaucoup amusé. Ce sont des personne si talentueuses. J'ai eu tellement de chance de pouvoir travailler avec eux. Même maintenant, de temps en temps je m'arrête, et cela ne frappe "Mon dieu, je suis né au Canada, maintenant je suis de l'autre côté du monde!". Je ne comprends même pas comment ça a commencé. Tout ce que je dois faire, c'est simplement profiter de ma chance, saisir les opportunités et me lancer.

 
Floating Landscape, Truth or Dare et Floating Landscape
F: Maintenant, j'aimerais parlé de vos projets récents. Tout d'abord Floating Landscape. C'est une coproduction avec la Chine entre autre, pourquoi ce choix ?
K: La Chine est un très gros marché, et je ne pense pas que le public là-bas me connaisse. Mais en premier lieu, ce qui m'a intéressé dans ce projet, c'est le scénario. Carol Lai, la réalisatrice, l'a écrit et dirigé. C'est une personne très sentimentale. J'ai vraiment adoré le scénario, la première version; C'est drôle, car j'ai eu le scénario en Juin, il y a un an, ensuite j'ai passé les auditions pour le film. Carol m'a alors dit que nous ne pourrions peut-être pas faire le film parce qu'elle n'avait pas encore trouvé de financement. Elle a donné le scénario à Stanley Kwan, vous voyez qui c'est ?
F: Oui bien sûr

Floating Landscape
K: Quand il l'a lu, il a aimé, donc il a aidé Carol à entrer en contact avec d'autres maisons de productions. C'est un travail qui a pris d'Avril jusqu'à Janvier dernier, où nous avons commencé à tourner. Donc j'ai eu le script pendant plus de 6 mois. Je le connaissais si bien, je me sentais si proche du personnage. Elle paraît très vulnérable à première vue, très douce et très tendre. Mais elle est très forte, très sensuelle. J'ai vraiment adoré ça. De plus, un des autres acteurs était Liu Ye, vous saez, l'acteur chinois de Lan Yu ? Je voulais tellement travailler avec lui. Quand j'ai sû qu'il jouait dans le film, j'étais vraiment emballée, j'avais vu ses performances dans les films, et j'avais adoré. En travaillant avec lui, j'ai tellement appris. Les acteurs et actrices de Chine suivent des cours pendant 4 ou 5 ans à l'université, et moi je n'ai jamais eu aucun cours d'art dramatique. Donc c'est complètement différent. Les acteurs à Hong Kong n'ont pas de formation, ils apprennent avec l'expérience. Liu Ye est tellement bon en interprétation, il peut rire à un moment, et être dans son personnage la seconde suivante. Je ne peux pas fraire ça, j'ai besoin d'un peu de temps. Donc j'ai beaucoup appris à ses côtés.

C'était étrange également, nous avons filmé une partie du film dans la région du QingDao en Chine, nous y sommes restés pendant un mois et demi à deux mois. A la fin, j'étais si triste, en passant deux mois avec toutes l'équipe, on s'attache beaucoup évidemment. Mais c'était une très bonne expérience.

F: Projet suivant, Truth or Dare. Jusqu'à présent, vos personnages étaient plutôt dans une veine dramatique. Avez-vous choisi ce film afin de vous diversifier un peu? En essayant un personnage plus "léger"?

Truth or Dare
K: Oui. Truth or Dare est une comédie, une comédie très réaliste, basée sur une histoire vraie. Les personnages ont vraiment existé, ils ont loué un appartement à Hong Kong. Donc c'est une comédie, mais on ne fait pas de grimaces pour faire rire. Ce sont de vrais personnages, afin qu'on puisse se sentir proche d'eux. C'était une très bonne expérience, car Barbara Wong, la réalisatrice, a un très bon sens de la comédie. Elle est sorti de l'Académie des Arts en 1998, à Hong-Kong, c'est une actrice. Elle a déjà réalisé un film avant, Women's Private Parts. Mais c'est une actrice de métier aussi, donc elle est très familière avec la mentalité des acteurs. Elle sait vraiment comment nous aider à construire un environnement, un personnage. Donc c'était très plaisant de travailler avec elle. De plus, elle est très ouverte. Si tu as une diée, ou si tu ne sens pas bien quelque chose, il suffit de lui en parler, elle est très sensible. Et très à l'écoute. Aussi, comme c'est une comédie, on s'amusait beaucoup sur le tournage tous lesjours. Ca ne me dérangerait pas de faire d'autres comédies. Même si au début j'avais très peur, j'ai tourné dans des drames surtout, donc j'avais peur de jouer dans une comdie, je ne me trouve pas vraiment très drôle. Mais j'ai vu un peu du film, et j'ai beaucoup aimé.

F: Donc ça ne ressemble pas à la série TV Feel 100%, c'est une autre approche de la jeunesse Hong Kongaise?
K: Oui, c'est très réel. Si on regarde Feel 100%, je ne pense pas que les jeunes à Hong Kong soient comme ça. Ils sont bien plus audacieux, et conscient de ce qu'ils veulent. Je ne veux pas faire de comparaisons, mais pour chaque personnage du film, c'est plus réel, par exemple je joue une écrivain, je suis très ouverte, très artistique, très libre d'esprit, je rends la vie plus facile. Nous avons essayé de mettre des situations réelles de la vie de tous les jours dans le film, comme le chômage, etc...
F: Et votre projet en cours, Heroic Duo, c'est un gros film d'action. Donc vous avez joué dans deux drames, un film fantastique, un mélo, une comédie. C'est donc à nouveau un genre différent. C'est voulu, ou juste un hasard?
K: Je veux essayer de nouvelles choses. J'ai trouvé l'histoire plutôt intéressante, et je n'avais jamais essayé ce genre de film. Donc j'ai voulu tenter ma chance et me pousser un peu. C'est assez différent et difficile.
F: Difficile physiquement ? Avez-vous suivi un entraînement particulier pour le film ?
K: Oui, j'ai été à l'armurerie, j'ai appris quelques coups de pied, de poing, des clés de bases. Je n'ai pas encore eu l'occasion de m'en servir, mais chaque jour, le chorégraphe des scènes d'action est sur le plateau, donc j'essaye de m'entraîner autant que possible avec lui. C'est très différent. Quand on film un drame, on prend le temps de tout mettre en place comme il faut. Mais pour un film d'action, c'est beaucoup plus rapide. Cela vient peut-être aussi du réalisateur, d'une façon de travailler différent. Donc j'essaye de m'adapter.
Ekin Cheng et Karena dans Heroic Duo
F: Qu'est-ce que vous attendez d'un film comme ça? Plus de réputation ? Ou alors est-ce juste pour vous amuser un peu ? Ou remplir le compte en banque ?
K: Non (sourire)... C'était seulement quelque chose que je voulais essayé. Et l'opportunité s'est présenté au bon moment. L'argent, c'est important bien sûr, mais je ne suis pas une personne à cheval sur l'argent. Je m'occupe très peu d'argent en fait. Je suis plutôt du genre "Oh génial, je n'ai jamais essayé ça". Alors j'y vais. Je suis un peu comme ça. Tout simplement.

Tous nos remerciements à Suki et Karena pour leur aide et leur disponibilité, ainsi qu'à Katherine Lee.

date
  • avril 2003
crédits
Interviews