Beaune 2011 : Appellation d'origine contrôlée

Les 3 prochains jours

Jamais d'oeufs sans trois pincées de sel, cette année Beaune s'affranchit complètement de Cognac, son prédécesseur, et s'impose assez logiquement comme plat parfaitement relevé et officiel "Festival International du Film Policier". Un incontournable qui, je l'espère, le restera encore longtemps. Allons-y pour utiliser le titre du remake américain du Pour elle de Fred Cavayé, membre du jury cette année, pour structurer le compte-rendu de ces trois jours passés sur cet excellent 3ème opus.


 

Vendredi 1er avril - 14h38

Au volant de ma vieille Cadillac pourrie, j’arrive enfin à Beaune. La route fut longue, épuisante. Un auto-stoppeur que j’avais aimablement embarqué me braqua peu de temps après, j’eus un mal fou à le dégager à coup de pompes. Pour me détendre, j’acceptai un peu plus tard de prendre en stop une jolie blonde esseulée. Esseulée mon œil car à peine avait-elle refermé mon coffre que sa bande de potes sortait de derrière un rocher pour grimper dans ma poubelle. Je démarrai en trombe sans les laisser me dire où ils souhaitaient aller, laissant la blonde se casser la binette par terre tandis qu’un des gusses, furax, me tirait dessus au calibre 38, ventilant mes pare-brise arrière et avant. Donc, Beaune. Les cheveux en vrac à cause du vent venant de devant ou de derrière selon que je fais une marche avant ou le contraire, j’ai un peu l’impression de venir de nulle part en garant ma caisse devant le ciné.
 
Vendredi 1er avril – 15h30



The Man From Nowhere

2.25/5 – Nowhere to hide but nothing to show

A ne pas confondre avec The Man Who Wasn’t There des frères Coen – aucun lien de parenté, sauf, à la rigueur, un lointain rapport entre un coiffeur et un djeuns blasé de tout sauf de sa coupe de cheveux - The Man From Nowhere est un Leon's like archi violent, encore une fois bien nihiliste dans ce genre hard boiled que les coréens poussent dans ses derniers retranchements. Won Bin y incarne un simili Crying Freeman assez convaincant malgré une posture "mèche rebelle" qui ne m'avait pas manqué. C’est crade : on enlève des gosses pour des trafics d’organes, et ça dépote, même si la réalisation est parfois brouillonne et le rythme en dent de scie. Parfois, aussi, il pleut, ce qui nous donne droit à l'usuelle vue plongeante sur des parapluies et des cheveux mouillés. Rien de neuf à l’horizon, si l’homme vient de nulle part comme un cow-boy de là-bas derrière la colline, ce film ne vient pas de nowhere, il est coréen pur jus et en l'occurrence ça n'est certainement pas un compliment : scénario d’une machine d’action Europacorp’ à la Taken où l'on remonte la chaîne alimentaire ; combats et ennemi empruntés à la trilogie Bourne mais aussi à la filmographie de Steven Seagle : bras cassés, duel au couteau final de Piège en haute mer et lourdes citations du Léon de Luc Besson, de la jeune gamine dont la mère vole de la drogue à de dangereux truands au voisin tueur solitaire sentimental, en passant par un méchant psychopathe qui pète un plomb dès qu'on lui abîme son chouette costard tout neuf. On emprunte, on recycle, on surenchérie… mal, parce qu’après tout HK ne s’en est jamais privé et parfois avec bonheur, mais les scènes d’action sont fouillies, pleines de plans serrés, de bras cassés qui ne le sont que par le bruitage, un son omniprésent, là pour remplacer ce qu’on ne voit pas à l’écran : Crac ! Spalsh ! Croutch ! Sans comic strip. Quant au propos, il est absent, on fait dans l’épate et l’on sert la soupe à Won Bin, acteur mannequin présent pour plaire en premier lieu aux midinettes. Paf, nous y sommes : on nage en plein manga irréaliste pour jeunes ados – manhwa, pardon – encore une fois illustré avec cette musique ronflante et tristoune typically coréenne à même de convenir aux jeunes aimant à se complaire dans un certain spleen délétère. On delete et mieux vaut se taire ? Ou suis-je définitivement trop vieux pour ces conneries ?  Saxo.

Vendredi 1er avril - 20h00

Recoiffé, j’attends mon contact, Nick Cheung, devant le tapis rouge. Il arrive en charmante compagnie. On parle tous les deux rapidement en langage codé, on se comprend. Puis il continue sa route et je continue la mienne…


Quelques (brefs) mots échangés avec Nick Cheung

Arno : Vous avez désormais joué tous les personnages possibles et imaginables dans un film policier. Lequel avez-vous préféré incarner ?

Nick Cheung : Celui du film que vous allez voir ce soir : le policier de Stool Pigeon (The Insider).

… et quel rôle aimeriez-vous maintenant interpréter ?

Le prochain sera également un film policier, j’y interpréterai un tueur. J’espère d’ailleurs que j’aurai l’occasion de revenir à Beaune pour le présenter !

Quel souvenir gardez-vous du tournage de Stool Pigeon ?

La chose est que tout le monde croyait qu’après The Beast Stalker j’aurais eu du mal à me dépasser, mais finalement avec ce film-ci, au contraire j’ai plutôt l’impression que j’étais un train de profiter d’un grand banquet ! On était vraiment très content pendant le tournage.

Quelle différence feriez-vous entre tourner pour Dante Lam et tourner pour Johnnie To ?

Question simple, réponse simple : Dante Lam est beaucoup plus jeune ! (rires)

D'accord ! ! A part ça comptez-vous encore tourner avec Dante Lam et Nicolas Tsé ? Afin de marquer cette collaboration par une trilogie ?

Le prochain ne sera pas avec Dante Lam mais nous travaillons actuellement ensemble sur un projet important...


 

La belle Linh-Dan Pham, actrice franco-vietnamienne (De battre mon coeur s'est arrêté, Pars vite et reviens tard...) fait partie du jury. Quelques photos pour la route...

… du coup je rate son film, The Insider. Je regarde mon programme, ça roule, il repasse demain et même après-demain. Je lève la tête, pour, surpris, apercevoir un peu plus loin ma blonde pseudo esseulée de ce matin. Un sparadrap sur la tête, elle est suivie de ses trois compères. Ils ont tous l’air très remontés ! Je m’engouffre dans un salle au hasard pour tomber nez à nez avec… Il était une fois un meurtre, de l’allemand Baran Bo Odar. Ca tombe bien, je voulais le voir, le danois Ulrich Thomsen joue dedans. Pas de chance, du coin de l’œil j’aperçois un des butors à mes trousses, un grand brun à moustaches. Il est là, debout, dans le couloir, captivé par une scène de viol sur l’écran. Ne souhaitant pas que ce titre conclue ma vie, j’en profite pour me lever discrètement et fonce dans la salle n°5. Ca tombe bien, à 21h00 ils projètent Time and Tide ! J’en profite doublement : j’arrive à semer Magnum et à revoir ce putain de film, n°3 dans ma liste des 10 meilleurs films asiat' de ces 10 dernières années ! J’oublie tout et replonge pour la énième fois dans ce seul vrai polar d’oncle Tsui.

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Time and Tide, ou le chaos urbain selon Tsui Hark !

Je sors de la séance comblé, heureux. Je marche l’esprit guilleret dans les rue de Beaune sans trop savoir où aller, quand soudain un déclic résonne derrière moi. Celui, caractéristique, du chien d’un revolver que l’on arme. Je lève les bras. Je suis fait. "Time and Tide wait for no man" : on ne peut pas arrêter le temps. Une voix de femme s’élève, froide et posée. « Conduis-nous jusqu’à ta voiture ». Piégé, je m’exécute. Je reste devant à marcher, sans voir mes nouveaux amis. J’entends leurs pas fermes et menaçants. J’écoute attentivement le martèlement des chaussures : ils sont tous là, elle et ses trois sbires. Je croise un camarade, Antoine de Anglesdevue.com. Il sort d’un bon restaurant, manifestement repu. Il ne se doute de rien. Je lui fais un petit signe de tête amical comme si de rien n’était. Hors de question de l'impliquer dans ma sale histoire. Il fait de même. J’aperçois, juste derrière lui, le jury spécial police. Ils sortent. Je tente ma chance et, sans laisser le temps à mes nouveaux amis de réagir, fonce demander un autographe à Monsieur Shen Yong, attaché de police adjoint auprès de l’ambassade de Chine en France. Je m’incruste et marche à leurs côtés un temps, sortant quelques banalités d’usage. Conscients du danger, mes ennemis se font la malle. Bien joué Nono, ça c'était une bonne… La malle ? Mais oui, suis-je bête ! La blonde avait refermé le coffre de ma Cadillac avant que je ne les laisse en plan : je dois avoir un truc à eux dedans. Un truc auquel ils tiennent particulièrement…

Faisant gaffe à ne pas être suivi, je courre jusqu’à ma voiture. Toujours aux aguets, j’ouvre le coffre. Bingo, il y a bien une valise ! Verte pomme. C’est moche comme couleur pour une valise, ça, vert pomme. Elle est fermée à clef. Ca n’est pas un problème pour moi, je sors mon tournevis « spécial valises fermées » et en deux coups de cuillère à pot résous ce faux problème. Je l’ouvre et… un bruit, derrière moi ! Je me retourne : un chat. On se calme… J’ouvre donc cette putain de valise pour découvrir, éberlué… des fringues. De femme. Je fouille, je cherche, mais ne trouve qu’une trousse de toilette, encore des fringues, du parfum… Qu’est-ce que c’est que ce bordel ? Je referme valise et coffre puis pars me coucher. La nuit porte conseil.

Samedi 02 avril - 10h00

Il fait un temps radieux, le public est présent en masse, les jeunes aussi… Beaune, ça y est, ça marche bien. Ca papote films dans les files d’attente : The Good Neighbours du canadien Jacob Tierney a clairement les faveurs du public, L.A I hate you est « trop bizarre », Vallanzasca (Placido) serait un « Mesrine à l’italienne très sympa », Mr Nice est « bien, surtout il n’est pas déprimant comme tout le reste » etc. Injuste, le public ? Sincère, surtout.   

Samedi 02 avril - 11h00


The Unjust

3.75/5 - You belong to the city

"You Belong To The City" (clip) est l'un des nombreux tubes qui émaillèrent la série Miami Vice produite par Michael Mann, réalisateur référent en matière d'esthétisme urbain au ciné.  

Je n’avais pas ressenti ça depuis… un bon bout de temps. C’est un polar, un vrai, ample, épique, rempli ras la gueule de vrais personnages, avec un scénario en béton armé soutenu par un discours à l’envergure urbaine vertigineuse gueulé depuis le toit du plus haut building de Séoul. L’enquête, tout le monde s’en cogne à part les braves citoyens devant leur télé qui se demandent : qui ? Qui peut bien être ce salaud qui tue des petites filles dans notre grande ville ? Le coupable, nous, on s’en fiche et le réalisateur également, ce qui est intéressant et sacrément jubilatoire c’est de voir cette ribambelle de sales types : flic, mafieux, promoteur, procureur, s’affronter autour de l’affaire, qui pour une promotion (pas le promoteur), qui pour un contrat immobilier (ok), qui pour sa tranquillité, le tout sur le dos d’un pauvre gars qui, à cause d’eux, laissera femme et enfant sur le carreau d’un bitume ensanglanté. C’est qui qui va aller en taule ?  



On papote, on écoute, on manipule, on évalue, on jauge...

Le mètre étalon en matière d’imbrications humaines en milieu urbain restant en ce qui me concerne The City Of Hope de John Sayles, je m’y suis d’abord référé pour ensuite m’en affranchir, passer par du King Of NY d’Abel Ferrara, du James Hellroy et finalement trouver une identité propre au métrage. La tonalité du The City Of Violence de ce même RYU Seung-Wan n’est pas trahie : on reste dans ce cadre muy macho, cours de récré, où des adulescents se mettent sur la gueule pour montrer qui qu’c’est qu’est l’plus fort. Puéril ? Oui, mais allumons notre poste de télévision, regardons les informations, examinons le comportement de nos grands chefs : c’est le cas, systématiquement. Le jeu a évolué, les méthodes employées diffèrent, mais l’enjeu reste le même : "qui qu’c’est qu’est l’plus fort". A nous de nous bidonner devant ce jeu de massacre hilarant, chargé en humour noir, où, selon les situations, le rôle de dominant / dominé s’inverse. Et lorsque l’on voit un flic ripoux envoyer paître un procureur pour ensuite, piégé, se prosterner devant lui, on peut sans peine imaginer les jeux auxquels se sont adonnés et s’adonnent toujours deux figures majeure du PPF actuel (paysage politique français).

Le métrage bénéficie d’un bon crescendo, notre appréciation des personnages change au fur et à mesure que ceux-ci font des choix, bifurquent, relancent de dix pour voir, bluffent ou tentent l’acte sincère pour avancer. Fascinant. La forme, brillante, porte le projet assez haut : la narration est d’une fluidité exemplaire, la musique de CHO Young-Wook (Thirst) originale, parfois Carpenterienne (j’adore !), et la photo de JEONG Jeong-Hun (les PARK Chan-Wook, Antarctic Journal…) juste somptueuse, en particulier lors d’une mémorable longue scène nocturne...

... sur laquelle aurait dû se clôturer le film, parce que quelques ultimes rebondissements vraiment dommageables viennent ternir le tableau en plus de le rallonger inutilement. C’est frustrant, parce qu’en s’arrêtant plus tôt au milieu d’une énième boucle de chassés-croisés on aurait obtenu un polar juste parfait. Nos turpitudes sont sans fin, la magouille appelle la magouille, la haute sphère de la grande ville est pathétique et les hommes, les vrais, se font injustement dessouder dans l’indifférence générale. Cela a déjà très bien été illustré ailleurs mais voilà un autre bon film à ajouter à ce panier à salade, qu’un twist malhonnête empêche malgré tout d’être grand. On y était presque : l’inspecteur Choi, joué par l’excellent HWANG Jeong-min, et le procureur Joo-yang, incarné par Ryu Seung-beom, par ailleurs frère du réalisateur, sont des personnages cultes en diable. Et pour longtemps.



... puis on fait semblant d'enquêter et on tire dans le tas.

Samedi 02 avril - 14h30

Après avoir gobé un casse-croûte je pars m’ingurgiter le dernier film du p’tit malin Duncan Jones (Moon) : Source Code, un ride ricain de SF léger saupoudré d’une bonne couche de mélo sur la fin. Cette divertissante resucée d’Un jour sans fin est fort sympathique mais je ne suis pas objectif pour deux sous : je kiffe grave les paradoxes temporels. Objectivement ? C’est un peu con-con. Lorsqu’un type pose une bombe dans un train ET qu'il annonce ensuite d'autres attentats, on recherche d’abord le coupable parmi ceux qui sont descendus du train avant de s’évertuer à le trouver au sein des victimes, non ? Oui mais le héros qui enquête a une excuse : il est militaire. Tout s’explique ! A peine vu, déjà oublié et je pars profiter du soleil à Beaune plutôt que de m’enfermer, encore, dans une salle de ciné. 

Incartade culturelle : Étienne-Jules Marey



Source intarissable d’anecdotes cinéphiles, mon camarade le Professeur Marc, entre une litanie dédiée à Sergio Corbucci et une autre à une actrice oubliée dont, euh… dont j’ai oublié le nom, me parle de la statue de Étienne-Jules Marey qui se trouve devinez dans quelle ville. Hop, ni une ni deux je vais la voir. Dans la partie ouest de Beaune centre, la rue E. J. Marey conduit à la place E. J. Marey où se trouve la statue de devinez qui. « Né à Beaune, pionnier de la photographie et précurseur du cinéma, Marey met au point, en 1882, le fusil photographique qui lui permet de photographier « sur nature » un être en mouvement sur douze poses ». La tommy gun qui prend des photos et la fameuse multi capture du pélican volant, c’est lui. Etonnant, non ? Pendant que nous y sommes, précisons que Claude Lelouch souhaite ouvrir une école de cinéma à Beaune, et que le maire, lors de la cérémonie de clôture, a annoncé l’ouverture d’une nouvelle salle de cinéma pour l’an prochain. Beaune, capitale française du cinéma ? La ville en prend le chemin.

Je suis en train de finir mes p’tites photos oisives quand je devine une silhouette au bout de la rue. J’oriente mon objectif : c’est mon poto Magnum ! Je me retourne, prêt à m’enfuir par une autre artère : impossible, un autre barbouze m’y attend en ricanant. Le chauve, accompagné du petit roux, caché derrière. Je regarde à droite : la blonde me bloque le troisième accès. Courageux (tu parles !), je fonce dans sa direction. Elle sort de sa poche un petit pistolet avec silencieux. Là, je suis en très mauvaise posture ! Je continue sur ma lancée, elle me vise et tire. J’anticipe, arrive à esquiver la balle mais devine l’impact : le pauvre Marey se mange la bastos ! Ca va tout de suite beaucoup moins le faire « Marey » ! Je ne laisse pas le temps à la tueuse d’encore m’aligner et la bouscule violemment de l’épaule, l'éjectant sur les pavés. Bien qu’habituellement plutôt gentleman, je ne m’arrête pas pour la relever et me dépêche de rejoindre les rues chargées de piétons. Derrière moi j'entends un volet et le mur d’une maisonnette qui encaissent d’autres balles. Je courre comme un dératé, je ne veux pas mourir ! Pas tout de suite, je n’ai pas encore pu voir The Insider de Dante Lam ! Ne me tuez pas ! J'arrive rue de Lorraine, je me crois enfin pénard : erreur. Malgré le monde, ils sont encore là. Ils me suivent doucement mais ils me suivent bel et bien ! Je remonte la rue rapidement en direction du cinéma. Je regarde derrière moi : ils se rapprochent ! Je traverse le boulevard Maréchal Joffre, paniqué parce que je suis de nouveau seul. Chanceux, j’aperçois hordes flics devant le cinéma ! Ah, merci ! Ils sont là, en bleu ! Ils présentent leurs vieilles voitures au bout du tapis rouge ! Je file me planter prestement au milieu d’eux pour prendre quelques photos. Rassuré, j'observe mes poursuivants, restés à l'écart. Je fanfaronne, leur lance un joyeux clin d’œil. La blonde, vulgaire, me fait un doigt, Magnum crache par terre, les deux autres restent stoïques. Partie remise… et Beaune est une toute petite ville...


   
 
Samedi 02 avril - 20h00

Soirée "évènement" avec l'hommage rendu à Claude Chabrol. C'est émouvant, triste : l'animal avait sa place au festival de Beaune autant qu'il l'avait eu à Cognac. En parlant d'animal, Animal Kingdom, premier film de l'australien David Michod, est projeté ensuite. Présentant brièvement sa bête, touché, le réalisateur concède qu'il aimerait bien qu'un jour on parle de lui ainsi tout en sachant ne présenter qu'un premier essai. Concluant ? Pas complètement. Si la réalisation est ok et les acteurs au top, cette histoire d'une famille de truands "enfermés dans une inéluctable spirale de violence" est un brin longuette et soporifique. C'est dommage parce que les acteurs, formidables, ont tous des tronches qu'on aimerait revoir dans un polar digne de ce nom. En l'état, Animal Kingdom gère plutôt bien ses montées de tension mais n'accouche jamais de scène d'action. C'est frustrant ! Tel n'est pas le propos ? Regardez la bande-annonce, regardez ce que l'on nous vend : on s'attend à de l'hargneux, du sanglant ! Du coup je me pose cette question : à partir de quand un film policier devient-il un drame policier ? Quand il a moins de quatre coups de feu au compteur ? Trop bourrin je suis dans l'âme, peut-être.

Je pars ensuite me coucher. Je fais démarrer ma Cadillac pleine de trous et me dirige vers mon hôtel. Mon rétroviseur n'est plus, c'est dommage, j'aimerais bien pouvoir y jeter quelques coups d'oeil pour voir si je suis suivi. Déjà que je plisse les yeux pour pouvoir voir la route devant moi... Alors je roule lentement et m'arrête fréquemment pour prendre le temps de me retourner. Je zieute le décor, cherche la p'tite bête. Je déteste quand mon instinct me donne raison : une Opel Corsa se trouve dans mon sillage. A cette heure, la circulation est loin d'être dense à Beaune, nul besoin d'avoir le moindre doute quant à l'identité des personnes qui s'y trouvent. D'autant que la tuture ralentit ou s'arrête en fonction des mouvements de la mienne. Ma blonde et ses comparses n'avaient pas de caisse, j'imagine qu'ils ont du prendre un automobiliste du coin en otage. Je cogite. Ils auraient sûrement aimé forcé mon coffre mais comme ma caisse est restée garée tout du long devant un ciné blindé de flics, ça a dû singulièrement les freiner. Ils ne m'ont pas suivi hier soir, sinon ils m'attendraient devant l'hôtel. Ou, tout du moins, loin du festival. Qu'est-ce qu'ils veulent, ces jobards ? Si je dois crever, j'aimerais bien savoir pourquoi ! J'aperçois un fast food. Mmm...

Dragon Fast Food Burger frites sauce ketchup 3D

Après m'être garé devant ce type de restau où tu bouffes ton sandwich plus vite que tu ne l'éjectes, je sors ouvrir mon coffre. La valise vert pomme est toujours là. Derrière elle, je vois mes sacs, ceux que je garde toujours pour faire mes courses. C'est que ça prend de la place, le Côte de Beaune ! Par acquis de conscience je les soulève et regarde dedans. Tiens, c'est quoi ça ? Dans l'un d'eux je vois une petite sacoche rectangulaire noire. Elle n'est pas à moi... J'entends un moteur qui s'approche. Sans prendre le temps de vérifier s'il s'agit bien de l'Opel Corsa vengeresse je me dépêche de refermer le coffre et j'entre dans le bâtiment. Avec la sacoche. Deux tables sont occupées dans un coin par une bande de jeunes. Sans rien commander, je vais m'assoir à côté d'eux. Ils boivent du coca-cola en s'empiffrant de burgers. L'un d'eux me rappelle Won Bin avec sa coupe de cheveux.

C'était à prévoir : ma blonde Marylin et ses copains Magnum, Vic et poil de carottes entrent à leur tour. Sans traîner, ils viennent tous s'asseoir en ligne, sur un banc, devant une table à quelques mètres seulement de la mienne. Ils sont accompagnés d'une petite vieille. Sans doute la conductrice. Elle est terrifiée, eux ont la rage dans le regard. Je sifflote en ouvrant la sacoche pour les narguer mais j'arrête net mon cinéma en voyant ce qu'il y a dedans. Vache ! A l'intérieur de ce petit machin noir je découvre des badges presse du festival pour une blonde, un chauve, un moustachu et mon petit roux. Sur la photo, on ne devine pas sa taille. Je trouve aussi des invitations à la soirée de clôture. C'est demain ! Ce sont des documents falsifiés, des copies. Ca sent le complot à plein nez ! Ils veulent assassiner quelqu'un. Je les observe, ils sont pivoine. Si leurs yeux étaient des hachoirs, on serait déjà en train de faire des burgers avec ma couenne dans ce fast food. J'observe le chauve. Je ne savais pas qu'il y avait autant de veines sur un crâne. J'essaye de ne pas me laisser impressionner par cette masse de haine et fouille encore dans la sacoche pour voir s'il ne reste pas des trucs. Il reste un truc. Une photo. Une blonde. Est-ce de ma blonde qu'il s'agit ? Non, c'est... c'est Mireille Darc ! Elle est membre du jury cette année ! Oh putain, ils veulent zigouiller Mireille Darc demain soir ! Mais pourquoi ? Pourquoi Mireille Darc ? Qu'est-ce que c'est que ces conneries ? Ah, il y a encore autre chose dans ce sac. Un flingue. Un silencieux y est rivé...

On se regarde tous fixement sans sourciller. La propriétaire de l'Opel se met à sangloter, faisant ainsi se taire Won Bin et sa bande qui, soudain conscients du danger, se lèvent et s'exilent prestement. Avec ma bande de tueurs, on ne se lâche pas des yeux. Une serveuse boutonneuse arrive, elle reste figée, à faible distance de nous. Les restes de burgers, de frites et de coca sur les tables d'à côté aimeraient bien se barrer eux aussi, je sens qu'il flippent. Il faut que ça bouge, on ne peut pas rester indéfiniment comme ça. J'invoque mes meilleurs réflexes et passe à l'action. A peine prends-je appuie sur ma table pour sauter par-dessus, vers la gauche, que Moustache et Boule de bowling dégainent leurs armes. J'atterris accroupi au sol et enchaîne immédiatement un roulé-boulé de façon à me trouver sur leur flanc. Comme ils sont tous coincés en ligne droite sur leur banc, je me dis que par le côté ce sera plus facile. Je l'espère mais je n'y suis pas encore : les flingues armés de silencieux balancent leur sauce sur moi et les "pop" résonnent dans la pièce. La serveuse hurle, le décors encaisse mais ils ne me touchent pas plus qu'elle. A mon tour : ils sont maintenant tous alignés devant moi et je ne vais pas me gêner pour me faire ma brochette de cons au 9mm ! Je sais que tout va se passer très vite. Pas moi j'espère. Je tire ma sauce barbecue dans le tas. Le premier bout de viande, ma blonde, se prend une bastos dans le crâne. Je lui en envoie une deuxième dans l'épaule gauche pour qu'elle dégage sur le côté et j'en mets une troisième dans le bide à magnum. La serveuse crie de plus belle. Moustache se plie en deux de douleur, ce qui me permet de shooter en plein coeur le chauve avec une quatrième balle. Tout ce petit monde s'effondre. Je m'arrête là : le rouquin s'est planqué derrière mamie. "Jette ton arme ou je bute la vieille !" me hurle t'il, paniqué. Son calibre tremble près de la tempe de son otage. Je ne moufte pas mais la serveuse hurle toujours. Je jette un oeil, elle n'a rien, elle est juste sous le choc. Magnum n'arrête pas de geindre au sol. " Ta gueule ! Ta gueule !" crie, complètement speed, mon seul ennemi encore debout, à la fille, derrière moi. Il se met à la pointer. Erreur : l'espace de quelques instants son bras droit passe au premier plan et il ne menace plus son bouclier humain. J'aligne le bras et tape en pleine cible. Rouquin hurle, de douleur cette fois. Son revolver tombe au sol, mamie s'évanouie et s'écroule. J'appuie encore sur la détente, ma sixième et dernière balle envoie la moitié du crâne de poil de carotte gicler sur la vitrine du fast food. La jeunotte se tait, elle s'est évanouie, elle aussi. Mon flingue est brûlant. Il fume. Je m'accroupis près du dernier de mes ennemis encore vivant. Il baigne dans son sang. Calmement, je lui demande : "Pourquoi Mireille Darc ?". Il me répond juste : " Maman... maman... " en fixant le plafond. Puis il meure. Je perçois son dernier souffle. Il refoule du goulot le sagouin.

Sans me démonter, je pars ensuite en quête du patron dans les coulisses du restaurant. Il faut le dire aussi vite qu'on y mange et qu'on y crève ! Je trouve le manager recroquevillé sous son bureau. Il n'a pas appelé la police, j'en suis persuadé. Je lui jette un verre de limonade au visage et lui explique mon plan : "Tu vas te faire virer si ce qui vient de se passer se sait. La population va assimiler ta chaîne de bouffe rapide à ce bain de sang, aussi je te suggère gentiment de te débarrasser des cadavres. Fais-en des petits pains de viande à l'ancienne. Et file quelques biftons en plus à miss tarte aux pommes allongée dans la cantine pour qu'elle la boucle. Quant à moi, tu ne m'as jamais vu." Le petit binoclard acquiesce, content qu'on lui propose une porte de sortie, prend un couteau de boucher et fonce, résolu, dans le restau. "Eh, attends !" lui dis-je. Il se retourne, interloqué. "Attends que je sois parti, j'en ai ma claque de cette boucherie." Puis je m'en vais. Je pars soulever mamie, quitte le fast food et l'allonge dans sa voiture. Je crois qu'elle se réveillera avec un bon mal de crâne et un mauvais rêve à raconter à qui elle veut, peu m'importe, personne ne la croira. J'espère juste qu'à cause de moi elle ne partira pas trop tôt finir ses jours à l'hospice. Sur les rotules je fonce enfin me coucher, avec dans mon coffre la sacoche, les flingues des macchabées et, toujours, ma valise vert pomme.

Dimanche 03 avril - 10h30

J'ai mal dormi mais Red Hill de l'australien Patrick Hugues me réveille bien comme il faut ! Le scénario est classique : un jeune officier de police, par ailleurs clone de notre ambassadeur Boris Boillon en Tunisie - pas de bol - vient s'installer dans la petite ville de province de Red Hill où un évadé de prison vient semer le chaos. Re pas de bol. A histoire simple traitement sacrément efficace avec une mise en place parfaite, des gueules patibulaires en pagaille et une action trépidante ! Avec en plus une incursion aussi brève que surprenante dans le domaine du fantastique, Patrick Hugues réussit haut la main son premier long métrage. Le bonhomme est à suivre de (très) près !

Dimanche 03 avril - 15h02

Il fait un temps splendide, un temps parfait pour interviewer quelqu'un, dehors. La vache Rolande, tiens, pourquoi pas ? Parce que Beaune la Rolande. C'est très drôle pour ceux qui connaissent. La dame a une vision assez pertinente du festival. Et, l'espace de quelques instants, je me sens moins seul.




Dimanche 03 avril - 16h30


The Insider

3.5/5 - The Insider en heure voit sa vie basculer

Dante Lam prend ses deux têtes d’affiche de The Beast Stalker, Nicolas Tse et Nick Cheung, respectivement flic coriace et tueur sanguinaire, puis s’amuse à inverser les rôles dans ce The Insider autrefois joliment étiqueté Stool Pigeon, traduisible chez nous par ce titre déjà célèbre : La chèvre. Loin d’être une comédie légère où s’y épanouirait un naïf Pierre Richard, The Insider voit Guy (Nicolas Tse) devenir une pauvre hère contrainte à se faire balance pour se sortir de la mouise tandis que le second, Don Lee (Nick Cheung), sort le costard trois pièces et la paire de lunettes respectabilisante pour incarner le flic ambitieux de service.

Ca marche ? Oh oui ça marche, ça courre même très bien, parce que s’il faut avouer que la relation d’un flic et d’une balance a déjà été surexploitée au ciné, particulièrement dans l’hexagone avec l’excellent Cousin du regretté Alain Corneau - dont, d’ailleurs, l’hommage s’est vu éclipser à Beaune par celui, très émouvant, rendu à Claude Chabrol, et j’arrête là l’aparté dans l’aparté - les personnages tiennent le haut d'un pavé martelé par les talons de la sœur de Guy qui tapine pour rembourser l'énorme dette de son père, décédé.



A gauche, Dee et Guy tentent de fuir ce monde de dingues. A droite, Don Lee assoit son pouvoir sur Guy.

Glauque et tortueux, le scénario charge ses personnages de fardeaux sombrissimes sans pour autant que le traitement n’abuse du pathos, ce qui, il faut le reconnaître, était un peu le cas dans The Beast Stalker et une bonne partie de polars hongkongais. Cette palme de la noirceur revient au personnage du flic au passé aussi tarabiscoté que nauséeux mais qui, étrangement, n’est pas développé à outrance. « Outrance », ne voilà t’il pas un beau titre pour un polar nihiliste made in HK ? Est-ce la quête du rôle tordu qui pousse ainsi les acteurs à signer pour le caniveau ? Anthony Wong obtint un prix pour Beast Cop, Nick Cheung en ramassa des tas pour The Beast Stalker… c’est à croire qu’il faut s’enfoncer dans les bas fonds pour être reconnu en tant qu’acteur, s’y enfoncer puis tenter d’en sortir. Il est vrai qu’on a rarement vu un acteur récompensé pour sa prestation dans le rôle d’un gendarme. La règle s’applique ici : le pion joué par Nicolas Tse le dame à Nick Cheung qui, malgré pourtant un job de « Job » en puissance ne provoque pas autant d’empathie que l’ex mèche rebelle de Time and Tide. Il n’y est pour rien, pas plus que Nicolas Tse d’ailleurs : la superbe GUEY Lun-Mei (Dee) s’est accrochée autant à mes rétines qu’au cou de Guy : c’est elle que j’ai suivi des yeux tout du long. Mon cœur s’est arrêté de battre dès son apparition. Ou il s’est emballé, je ne sais plus. Elle donne de l’ampleur à une superbe scène de poursuite en pleine rue, arrache le plus beau baiser du festival à la révélation de Bodyguards and Assassins et, enfin, s’avère fichtrement bouleversante dans un final barbare qui, à n’en pas douter, fera date. Non pas par sa violence, car si elle est extrême et logique on a déjà vu ça à HK, mais par son décor, une vieille école abandonnée en ruine où tout le monde finit par se mettre sur la tronche dans des classes remplies de chaises et tables d’écoliers usées.

Fight Back To School On Fire

Soudain, au milieu de cette barbarie, de ce chaos, de ce monde de merde où plus personne ne respecte rien ni personne, où la notion même de principe parait désuète et stupide parce que suicidaire, l’arrivée de cette école, fantôme d’un espoir passé et révolu, enfonce un clou déjà bien profond en nous montrant qu’un jour quelqu’un avait cru à quelque chose mais que, voilà, ça n’a pas pu se faire, désolé. On bascule dans le post nuke, le constat affreux qu’à une époque des gens souhaitaient construire du beau en pariant sur une éducation qui empêcherait cet horrible comportement survivaliste de masse… en vain, ça n’a pas fonctionné. Depuis, ces belles âmes n’ont pas été renouvelées et personne ne croit plus en rien. Sans se transformer en un Ken Loach de l’ex-colonie, n’exagérons pas l’image, Dante Lam confirme après The Beast Stalker que ça n’est pas parce qu’il reste fasciné par les techniques et technologies policières qu’il néglige forcément la portée sociale de ses polars, qu’il se sert de certains aspects de la Catégorie III simplement pour racoler ou blinder ses acteurs : il a de belles choses à dire, et si sa mise en scène n’atteint jamais le génie de celle d’un Ringo Lam et si la photo HD bizarre n’est pas toujours d’un esthétisme bienvenu, son polar vient s’ajouter à tous ceux qu’on aime, et, je le parie, durablement. En guise de cerise sur le gâteau on assiste à une judicieuse rencontre entre les éternels perdants que sont Guy et Dee, une scène qui possède la fraîcheur d’un Wong Kar-Wai d’antan et provoque un beau sourire béat en plein milieu d’une histoire qui ne s’y prête pas, mais alors pas du tout. On retrouve le grand huit à la HK, ces films où « il se passe quelque chose ». Parce que dire d’un film où il ne se passe rien qu’il s’agit d’un « film d’ambiance », souvent entendu à Beaune cette année (coucou Animal Kingdom et Small Town Murder Songs !), relève de la facilité caractérisée et d’un flagrant manque d’imagination. Merci à Dante Lam, merci à Nick Cheung, merci à Nicolas Tsé, et grand merci à la très troublante et j’espère pleine d’avenir Guey Lun-Mei, de remettre les pendules à l’heure quant au potentiel toujours actif du cinéma hongkongais. La braise est encore chaude.  



La belle GUEY Lun-Mei n'a certainement pas besoin de flingue pour déglinguer la gent masculine !

Dimanche 03 avril - 19h00

Cérémonie de clôture

 

A ma surprise générale le Grand Prix est attribué à The Man From Nowhere de LEE Jeong-Beom, tandis que le Prix du Jury consacre deux films : Bullhead du belge Michael R. Roskam et Il était une fois un meurtre de l'allemand Baran Bo Odar. Le Prix de la Presse est lui aussi donné en doublon : "re" à Bullhead ainsi qu'à Animal Kingdom de l'australien David Michod. Avec 121 bouteilles offertes à chacun des gagnants, autant vous dire que le réalisateur belge, présent, n'en revient pas. Le jury Spécial Police, constitué donc de policiers, choisit de récompenser le film d'espionnage L'affaire Rachel Singer de John Madden, déjà programmé au dernier festival de cinéma américain de Deauville. A Régis Warnier, président du jury, de prendre note de cette décision et de souligner qu'étant donné qu'il n'y a aucun policier dans ce film, les réalisateurs ont encore du pain sur la planche pour satisfaire la profession dans ce domaine ! La présidente du jury Spécial Police Danielle Thiery, commissaire divisionnaire honoraire, s'avoue en effet un peu fatiguée par tous ces personnages de policiers corrompus et/ou au lourd passé chargé en drames, qui ont bien souvent au-dessus d'eux une hiérarchie laborieuse en guise d'obstacle permanent. Pertinente mais surprenante déclaration ! Le film L.A I Hate You, signé du français Yvan Gauthier remporte de son côté le prix Sang Neuf.

Régis Wargnier a attribué le grand prix du bout des lèvres après s'être longuement extasié sur le belge, certes, mais de là à ce que certains en concluent des petits arrangements entre amis avec force corruption vinicole dans le jury...

Conclusion ? Si en parlant de la fille de Dario Argento, certains cuistres trouvent qu’elle est bonne, Asia, Beaune Asia ça n’est pas pour tout de suite. Mais on s’en rapproche : trois des films en compétition, sang neuf inclus, sont asiatiques, ont majoritairement (déjà…) de bonnes critiques et notes sur Cinemasie, et l’un d’eux est reparti de la capitale des vins de Bourgogne avec le Grand Prix.  

J'attendais sans doute trop d’une programmation « Hong Kong Polar » qui s’annonçait beaucoup plus large en amont du festival, mais en l’état elle fait bonne figure : Infernal Affairs, Time and Tide, The Mission, Triangle et Filatures furent présentés habilement comme suit par le journaliste Léonard Haddad : « (…) A dire vrai, ce n’est pas vraiment du cinéma de Hong Kong qu’il est ici question mais du cinéma dans Hong Kong, le cinéma dans la ville. Le polar HK aura été ce cinéma de ruelles et de petits espaces, où les protagonistes sont pris au piège comme des rats ou des souris en cage (…). » C’est bien vu, dans ce cadre les films sélectionnés s’avérèrent clairement pertinents, et qualitativement, c'est l'Asie qui dominait le festival cette année, avec à ses côtés le jouissif australien Red Hill.

Le festival de Beaune évolue vite et bien. Il est ambitieux et l'année prochaine devrait être encore mieux. Le public était présent, respecté et respectueux, majoritairement enchanté, les journalistes étaient particulièrement soignés (à part l'ITW rikiki de Nick Cheung, et encore...), le soleil était (presque) toujours là... Bref : l’édition fut en tous points excellente. Chipotage d'ordre tout personnel : la musique d’ambiance diffusée dans les salles avant chaque film était un brin trop triste, tout comme la partition « freaks » d’Elephant Man pour les soirées évènementielles. Les artistes sont-ce des freaks ? A méditer.



Beaune, c'est fini. Une dernière photo du ciné, vide, by night.


Arno Ching-wan



* Merci à Nick Cheung d'avoir bien voulu répondre à mes quelques questions.
* Merci au Public Système pour son accueil, en particulier Agnès Leroy, Céline Petit et Clément Rébillat pour leur amabilité.
* Merci à la ville de Beaune pour cette organisation d'un festival dédié au cinéma policier.
* Cordial bonjour à Antoine, Marc et Hugues, de fiers cinéphiles avec qui il fut très plaisant de converser tout au long de l'évènement. 

Site du festival

CR Beaune 2009 sur Cinemasie


Lundi 04 avril - 09h10



Après un rapide passage chez le garagiste, je m'en retourne d'où je viens. L'autoradio joue le tube "Beaune to be alive" de Patrick Hernandez. So long, Beaune...

...

Quelques jours plus tard, après avoir brûlé sacoche, valise et envoyé flingues par le fond dans la Loire, par curiosité je me renseigne sur d'hypothétiques disparitions en France, spécialement du côté de Beaune. Un peu par hasard je tombe sur un drame familial qui m'interpelle. A la rubrique faits divers du Journal de Côte d'Or, je lis qu'une femme dans la force de l'âge s'est suicidée il y a quelques jours à Dijon. En guise d'explication elle n'a laissé qu'une lettre haineuse. Fanatique adepte d'Alain Delon, elle y parle de sa jalousie maladive pour les différentes compagnes qu'il eut dans sa vie, en particulier Mireille Darc dont elle ne supporte pas la proche venue à Beaune. Si près d'elle. Cette pauvre femme a vécu l'évènement comme une ultime provocation, ne l'a pas supporté et a choisi de mettre fin à ses jours. Je farfouille ensuite dans des journaux plus sordides et découvre dans le Récent Détective qu'elle-même eut plusieurs compagnons dans sa vie. Tous, à quelques différences près, étaient des sosies de l'acteur. J'observe attentivement les photos : un grand brun à moustaches, un beau blond, un chauve plutôt costaud et un rouquin. Sur la photo, on ne devine pas sa taille. Ils ont comme un air d'Alain Delon, en effet. Avec chacun d'eux elle eut un enfant. Tous sont actuellement portés disparus. 


 
date
  • avril 2011
crédits
Festivals